Alain Duault est un poète rare qui n’écrit que ce qu’il y a de plus profond pour lui et pour nous. Pas de descriptifs ou de décorum : faire de la poésie à la fois le plus abstrait et le plus concret des arts. Et un appel, dans une marche « forcée » dans les rues des souvenirs. Mais pas seulement. Le tout pour conduire l’être vers ce qu’il a perdu et ce qui lui échappe.
Pour autant, Duault ne tombe pas dans une simple « nostalgia » à la traîne d’une queue de comète. Le poème s’étoile dans un acte qui devient une actualisation inédite de l’ordre du symbole matériel au-delà d’un défaut, d’une absence. S’affirme un ailleurs ici même comme présence puissante et immanente face aux représentations héritées. Bref, l’œuvre en ses « filatures » efface le nocturne au profit de la lumière.
Qui se montre ? Qu’est-ce qui est révélé ? A l’imago, au fantasme est substituée la vision de ce qui échappe et que Duault saisit autant à l’instinct, l’émotion que par l’intelligence. Ce qui s’ignore et ce qui se perd et demeurent. Le poète leur donne une clarté aux effilements de la lune à son premier quartier comme lorsqu’elle est pleine. Surgit une présence sourde, sensuelle devant le ciel. Il existe des bords et des cœurs. Mais pas celui qu’on assimile à l’âme. D’où la tendresse du vide, du plein, de la lumière.
Reste la recherche « des seins tendres une douceur framboise /Peut-être la beauté.» Cela suffit à remplir une vie.
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jean-paul gavard-perret
Alain Duault, Ce léger rien des choses qui ont fui, Gallimard, collection Blanche, Paris, 2017.