Marc Vassart, Le Serval Noir

Que faire de tant de pièces qui encombrent ?

A la recherche de la mythique langue mère

L’argu­ment est l’histoire d’un eth­no­lin­guiste qui pour conser­ver ses petits avan­tages et hon­neurs liés à son poste de chef de labo­ra­toire au Musée de l’Homme et mis en dan­ger par l’ouverture du Musée du quai Branly décide de ten­ter un « coup » pour être célèbre, incon­tour­nable et donc indé­trô­nable.
L’auteur nous raconte donc com­ment cet émi­nent pro­fes­seur va par­tir à la recherche de la mythique langue mère qui serait la langue unique dont décou­le­raient toutes les langues par­lées ou ayant été par­lées sur terre. Sa quête de la langue mère en Afrique va se pro­lon­ger, de façon freu­dienne, en quête du père.

Le roman­cier com­mence par cas­ser le temps, car cette his­toire se situe dans la troi­sième décen­nie du troi­sième mil­lé­naire, et Chi­rac est tou­jours pré­sident, ce qui mon­tre­rait que le PS est des­cendu bien bas pour ne pas par­ve­nir à battre un Chi­rac nona­gé­naire. Le héros part donc au Kenya pour pro­fi­ter du désordre qui va être consé­cu­tif à l’invasion du pays par les USA afin de « sub­ti­li­ser » une pote­rie gar­dée dans un musée de la capi­tale, pote­rie qui devrait lui per­mettre grâce à un « jou­jou » extra­or­di­naire d’entendre la langue mère.
Ses aven­tures tiennent plus d’un film tel que La chèvre que d’ Indiana Jones. Une fois la pote­rie récu­pé­rée, il se lance à la recherche d’un père dis­paru il y a long­temps, et va vivre quelques semaines avec un des der­niers peuples de chasseurs-cueilleurs encore, ce qui va don­ner lieu aux meilleures pages du livre.

Quand on remonte le temps, cela est comme lorsque l’on remonte ce qui sert à le mesu­rer, comme un réveil, il reste tou­jours des pièces dont on ne sait pas quoi faire et qui encombrent. Cela peut expli­quer pour­quoi inter­vient, tel le che­veu dans une soupe déjà indi­geste, une évo­ca­tion de Stan­ley à la recherche de Living­stone. Cela dit, ce livre a un énorme avan­tage : il est excellent pour mon ego, ainsi que ceux de beau­coup d’autres. En effet, la qua­trième de cou­ver­ture nous le pré­sente comme un puits d’érudition ; si pour être éru­dit il suf­fit de savoir uti­li­ser Wiki­pé­dia (dont cer­taines phrases du livre semblent être un « copier-coller »), ou de mani­pu­ler les mots de la langue d’un pays (je sais le faire pour les pays ger­ma­no­phones, anglo­phones et luso­phones) plus une langue par­lée par une mino­rité de ce pays (le wal­lon, ça compte ?), je me sens assez éru­dit !
Quand je par­lais de l’ego d’autres, je pen­sais par exemple aux com­men­ta­teurs spor­tifs qui, comme l’auteur, vont uti­li­ser les mots Man­schaft plu­tôt qu’équipe, sele­çaõ plu­tôt que sélec­tion, ou des m’as-tu-vu des métiers du spec­tacle, par­don, du show-business, qui vont dire sam­pling plu­tôt que échan­tillon­nage. J’avoue que par­ler le swa­hili est plus chic que le por­tu­gais. Enfin, ne soyons entiè­re­ment néga­tifs : si par mal­heur, vous échouez après un nau­frage et trou­vez un coffre conte­nant une cen­taine livres, que vous avez déjà eu le temps d’en lire plu­sieurs fois 99 et qu’il ne vous reste plus que Le Ser­val Noir, lisez-le sans crainte, car vous aurez sans doute déjà connu expé­rience plus difficile.

Hervé Souf­flet

   
 

Marc Vas­sart, Le Ser­val Noir, Au Diable Vau­vert, 2008, 468 p. — 20,00 euros.

 
     
 

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