Sauver les meubles, perdre les repères
Elizabet Prouvost est à l’aise au milieu du mobilier onirique et tellurique de Michel Haillard. Ses ombres y planent, investissent les lieux, s’étendent nues sans qu’on y prennent garde et offrent ce que les mots ne réussissent pas à donner : une réflexion et une lumière étranges. Elles renvoient le voyeur vers un destin qu’il ignore. Et soudain celui-là, dessaisi de sa volonté, sort d’un état spectral et semble s’animer. A moins que ne se produise l’inverse…
Par les photographies, il rentre soudain en demeure d’hypnose ou de sidération. Tout devient joyaux au milieu de l’univers de Haillard. Ses meubles comme les photographie d’Elizabeth Prouvost se métamorphosent en monstres anatomiques par effet de clarté. La nuit est remplacée par le jour, le jour par lui, l’inerte par le vivant ailé, le statisme par des courants d’air sourds. Un clair-obscur reste de rigueur en une fête étrange, un plaisir visuel particulier et précieux.
L’atelier devient le réceptacle de cérémonies secrètes aux alchimies étranges, fantomatiques et pourtant plus probantes que le réel. Il en devient iridescent, poétique et radieux. Chaque objet, chaque photographie se présentent comme un volume plein isolé dans l’espace. Mais au lieu de s’emmurer, il s’ouvre à la dissémination spatiale à mi-chemin entre la fascination et l’abîme.
jean-paul gavard-perret
Elizabeth Prouvost & Michel Haillard, Anges obscurs & Démons radieux, Michel Haillard, 7 rue Morand, 75011 Paris, 20 et 21 mai 2017.