Guy Martin : un chef à Venise
Ce projet artistique est inédit. Il a le mérite de créer la rencontre non seulement de l’art contemporain, de la poésie, et de la haute couture — ce qui est relativement courant — mais aussi de l’art culinaire. Il est défendu ici par un des chefs majeurs, esthète rare et à haute valeur humaine : celui du Grand Véfour (entre autres). Guy Martin donne ici toute la puissance de son don des saveurs.
Les personnages, les reliefs, les peuples et paysages de papier de Claudine Drai se trouvent ainsi rehaussés habilement par l’intrusion du chef afin que les sens soient mis en résonnance aux côtés de la poésie d’Olivier Kaeppelin et des silhouettes d’Hubert Barrère. L’attention du regardeur se trouve attachée non seulement au regard mais à d’autres relations impalpables mais fortes de fragrances subtiles.
Elles se cristallisent au delà de simples états corporels ou du logos grâce aux indices de Guy Martin. L’art prend une autre dimension : une puissance rimbaldienne à travers le jeu des indices. Ce qu’il est convenu d’appeler l’intégrité constitutive de l’art se trouve renforcée. L’image est affectée d’un “je ne sais plus ce que c’est” (Beckett) là où les divers éléments constitutifs d’une telle exposition et par la présence des saveurs agissent solidairement.
jean-paul gavard-perret
Claudine Drai, Hubert Barrère, Olivier Kaeppelin & Guy Martin, Le Lien des Mondes, du 10 mai au 27 septembre, Magazzino Gallery du Palais Contarini-Polignac de Venise :