Brassaï & Roger Grenier, Correspondance, 1950–1983

Paris est une fête

Grenier a beau­coup écrit sur la pho­to­gra­phie. Dans le secret d’une photo, Ins­tan­ta­nés res­tent des livres majeurs sur cet art. Il le pra­ti­qua lui-même très jeune et plus tard il devint un des amis plus proches de Bras­saï. Cette ami­tié fut indé­fec­tible comme le prouve la cor­res­pon­dance que Gal­li­mard publie. Elle est pré­cé­dée de Bras­saï est les lumières de le ville, un des plus beaux essais écrit sur le pho­to­graphe. Certes, il ne révé­lait pas ses secrets mais Gre­nier les soup­çonne tout en met­tant les points sur les i sur des racon­tars col­por­tés sur le pho­to­graphe.  Entre autres, les pré­ten­dus demandes de poses incon­grues que Bras­saï  aurait adres­sées à Henry Mil­ler.
Roger Gre­nier explique la genèse des pho­tos noc­turnes de l’artiste, sa capa­cité à trou­ver des solu­tions ori­gi­nales et « par­fois sau­gre­nues » pour cap­ter pros­ti­tuées, clo­chards ou autres sujets. Il prouve en élar­gis­sant son approche que « l’art qui ment le moins » est bien la pho­to­gra­phie. Elle est pour Bras­saï  le trem­plin pour l’imaginaire même si aujourd’hui les « sel­fies » ne sont pas faits pour cou­ron­ner un tel art.

Dans cette cor­res­pon­dance, Gre­nier demeure tel qu’il est : peu disert (c’est pour­quoi il sera judi­cieux pour le connaître de se réfé­rer à l’entretien pas­sion­nant que vient de publier  Zone Cri­tique - février 2017). Bras­saï et son épouse y sont plus bavards. Mais il est vrai que ces échanges épis­to­liers ne sont là que pour com­bler les absences du couple : il voya­geait beau­coup mais n’oubliait jamais celui qui est lec­teur chez Gal­li­mard depuis 1964 et reste Régent du col­lège de Pata­phy­sique. Il  connut très bien son fon­da­teur « Emma­nuel Peillet, alias Anne de Latis, Jean-Hugues Sain­mont, Dr San­do­mir, Méla­nie le Plu­met, Oktav Votka, Elme Le Pâle Mutin, etc. C’était un pro­fes­seur de phi­lo­so­phie pince-sans-rire très drôle ».
Pour autant, Gre­nier ne fan­fa­ronne jamais. Pas plus dans sa vie, ses livres que dans cette cor­res­pon­dance. Et l’auteur de pré­ci­ser : « On m’a repro­ché il y a quelque temps de ne jamais y mettre les pieds mais c’est pour­tant, pour moi, un des prin­cipes de la pata­phy­sique, qui est de ne rien faire. J’y suis fidèle »… Comme il fut fidèle à Bras­saï. L’artiste et sa femme purent “comp­ter sur lui”. Et il aurait pu leur adres­ser ces mots que Camus lui adressa. Ses actes et cette cor­res­pon­dance le prouvent.

jean-paul gavard-perret

Bras­saï & Roger Gre­nier, Cor­res­pon­dance, 1950–1983, Gal­li­mard, Paris, 2017. En librai­rie le 20 avril 2017.

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