Dans l’ombre acide d’un long chemin vers l’extinction
Gilles Deleuze rappelle, dans L’Épuisé que tout acte de création est un acte de résistance. Hélène Zimmer le prouve là où pourtant tout semble tomber en charpie dans son portrait de femme, victime pugnace et endurante. Surtout victime d’elle-même via les substrats culturels qui l’ont conditionnée.
Concevant son roman dans la douleur et une certaine retenue, l’auteur rappelle un univers quotidien. Surgit l’histoire, sinon d’amour, du moins de ce qui en tient lieu au fil du temps, en un mouvement d’affaissement. L’auteur le rappelle en multipliant les traces que l’écriture creuse entre dialogues et descriptions. Le monde devient ce que la narratrice en dit, en voit.
L’héroïne est de moins en moins actrice de qui elle est et reste plus encline à remarquer les agissements des autres que les siens au sein d’une étreinte insupportable. A force, les mains se gercent, le cœur se vide, l’esprit erre dans l’ombre acide d’un long chemin vers l’extinction.
Hélène Zimmer le « remonte » à sa façon au moment où tout laisse sérieusement à désirer. L’auteure témoigne de son absence à soi « Pour que sans jamais cesser tout aille sans cesse cessant” comme écrivait Beckett dans Watt. Certes, on n’est pas encore dans l’épuisement des héros du Prix Nobel. Mais on n’en est pas loin.
jean-paul gavard-perret
Hélène Zimmer, Fairy Tale, P.O.L éditions, Paris, 2017.