La voiture à pédales narrato-philosophique rouge Ferrari d’Enthoven, le pompeux pompier, fonctionne à pleins jarrets en une compulsion de puissance. Son logos met moins en exergue les notions de déplacement et de danger que le désir inconscient de plaire par un haut degré de pénétration dans l’air du temps. Tel “Le Bambino” de Dalida, il gratte sa mandoline à concepts pour se livrer à des préludes, stimulations et simulacres pata-philosophiques propres à se faire pâmer des épouser délaissées et les concubines en attente. Les unes et les autres aiment à tremper les doigts dans la confiture philosophique du faux dandy pour supporter le spectacle routinier de leur existence.
Par l’immobilisation dans le cockpit de la voiture à pédales, Enthoven s’invente en personnage de fiction en ce qui tient, sous forme de réflexions para-philosophiques, d’un cinéma personnel de faubourg mais de vrai bourgeois. Mi-Tarzan et mi-Fangio, Enthoven échappe juste ce qu’il faut à la ratiocination afin de créer des moulages particuliers.
Sous prétexte d’un espace excentré et mobile, son savoir reste centré et immobile. Mais le philosophe en Berlutti sait jouer le garçonnet qui nourrit de rêve le mécanisme mental de ceux qui croient toucher là à la philosophie en tant qu’ultime vertu ou berlue.
Les lectrices rêvent de prendre sur leurs genoux non seulement le livre mais son auteur. Moïse sortant de l’eau, il fait tout afin d’attiser leur passion en rendant la philosophie plus lisible qu’un roman de Delly (pour les plus âgées d’entre elles). Son Gini plus gazeux que philosophique fait prendre l’auteur pour un génie.
Dans le formidable cortège humain des médiatiques, l’auteur reste donc un prince sans rire dont la foule d’admiratrices est de plus en plus compacte. Quoi de plus normal : sa philosophie portable est un masque de carnaval. Les Pénélope d’Ulysse voire de Fillon font de l’histrion leur Pierrot d’amour et les bûcherons leur penseur de rondins.
jean-paul gavard-perret
Raphaël Enthoven, Little Brother, coll. Blanche, Gallimard, Paris, 2017.
Bien sûr, je jette…