Jacqueline Devreux conjugue les couples loin des postures admises. On ne sait si les partenaires aspirent aux plus brillants essors. Il y a des avants, des après voire l’indifférence. Pas de pathos pour autant. Manière de suggérer que le couple fonde et brise. Mais la photographe ne donne pas de réponses. Dans les tréfonds obscurs peut s’y chercher l’image d’une autre femme, d’un autre homme qu’on aurait côtoyée peut-être du moins rêvée à l’évidence.
Surgit le regard ambigu sur le statut non moins ambigu du couple dans une société avide toujours de cloisonnements et de pérennité. L’artiste nous donne à voir le travail de sape salutaire de la vraie liberté. Celle qui révèle l’énigme sans en donner la clé même si les couples semblent faire le vide autour d’eux. Reste une magie tendre, grave, drôle. Inquiétante ? : juste ce qu’il faut.
Preuve que dans la contemplation des portraits le réel n’est pas parti. Du moins pas trop loin. Pas en totalité. Les portraits deviennent des romans. Des nouvelles. Un cinéma (presque) muet. Mais nul n’en connaît la chute. Chaque couple est peut-être la dupe consentante de la non-dupe. Ça a un nom. C’est l’existence. L’existence dépouillée.
jean-paul gavard-perret
Jacqueline Devreux, Drôles de couples, La plus petite galerie du monde (ou presque), Rie des arts, Roubaix, février 2017.