Encore la guerre, mais quelle guerre !
Denis Bajram, avec cet album, se situe à la moitié de son récit, cette épopée qu’il a conçue et orchestrée sur trois cycles de six albums. Les six premiers ont raconté une guerre universelle qui a amené à la quasi éradication de l’espèce humaine de l’univers. La figure centrale en était Kalish, un mathématicien de génie qui a su préserver une souche humaine en créant Canaan. Ce nom n’est pas choisi au hasard, : en effet, dans la Bible, Canaan désigne une partie de la Palestine avant l’époque romaine. D’ailleurs l’auteur s’inspire beaucoup de contenus bibliques qu’il transpose dans un futur, dans un espace les mettant à la dimension de celui-ci.
L’auteur joue avec le présent de son intrigue, le passé, mais aussi avec des prolongements dans le futur autour de paradoxes temporels, mettant en scène nombre de théories physiques, métaphysiques, philosophiques. Il puise aussi dans notre actualité, dans par exemple, cet état de guerre économique entre les puissances financières qui s’affranchissent des frontières des Etats, de leurs lois pour multiplier les profits et enrichir un groupuscule de nantis. Pourquoi ? Comme les millions, les milliards de personnes qu’ils ont exploitées, rançonnées, ces derniers finiront en cendres ou en garde-manger d’asticots.
La première Guerre Universelle a été apocalyptique, manquant anéantir l’humanité. Les Compagnies Industrielles de Colonisation spatiales (CIC) sont entrées en conflit avec la Terre pour des raisons politiques, économiques et de concurrence. Elles ont mis au point un trou noir artificiel, le Wormhole, d’une redoutable efficacité. Quelques têtes brûlées réunies autour de Kalish, un génie des mathématiques, ont pu les mettre en déroute. Une paix fragile s’est instaurée et Kalish, pour les survivants, a fondé Canaan.
Quelques années plus tard, un nouvel ennemi inconnu frappe le système solaire détruisant le soleil, la Terre et s’en prenant à Canaan. L’évacuation de cette dernière s’est faite avec le Gengis Khan, alors que Théa, une descendante du mathématicien use du voyage spatio-temporel pour faire venir Kalish près d’elle.
Le tome 3 du second cycle débute avec un groupe d’extraterrestres qui, sur un écran, manipulent un triangle. Dans une navette Théa, Khalish et quelques autres attendent l’inéluctable disparition de Canaan avec la pose du dernier triangle de la géode. Khalish s’aperçoit avec stupéfaction qu’il est devenu un dieu, que sa légende s’est développée autour de la création de Canaan, au point de se transformer en religion.
Théa contacte le Gengis Khan où Vidon, son cousin joue les chefs. Sur son conseil, elle et Malik partent inspecter le vaisseau et repèrent un triangle, au noir absolu, collé contre une paroi extérieure. Plus tard, c’est avec Moffa qu’elle ressort pour de débarrasser du parasite. Alors qu’ils tentent tous les moyens pour s’en débarrasser, ils voient des boules lumineuses qui quittent l’espace presque clos de Canaan. Ils comprennent que la destruction est imminente et que le vaisseau doit partir immédiatement. Tant pis si les deux personnes qui sont sur la coque n’auront pas le temps de rejoindre l’écoutille et de la verrouiller. À la seconde où le départ va se faire, une panne d’énergie immobilise le vaisseau. Quand ils réussissent à le remettre en marche, ils aperçoivent la lumière d’un soleil, pensant que Canaan n’est plus dans la géode. Or, la planète qu’ils survolent est inconnue. Ils vont, alors, aller de surprises en surprises…
Denis Bajram réalise nombre de prouesses graphiques, à la dimension de son scénario. Chaque case est particulièrement soignée. L’organisation, le découpage de chaque page, de chaque double-planche s’inscrivent comme un tout pout magnifier une réelle harmonie visuelle. Plus que jamais, cette série s’impose comme une grande réussite tant scénaristique que graphique.
feuilleter l’album : http://www.casterman.com/Bande-dessinee/Catalogue/albums-universal-war-two/universal-war-two-3-lexode1#&gid=1&pid=1
serge perraud
Denis Bajram (scénario, dessin et couleurs), Universal War Two –t.3 : “L’exode”, Casterman, octobre 2016, 48 p. – 13,95 €.