Dalida est au cinéma ce qu’Isabelle Huppert est à la chanson : à savoir une erreur de casting. Ce qui n’empêche pas les deux femmes fatales de rester des égeries pour les gays et des icones rétro pour les générations sous perfusion nostalgique. Tout est bon dans le jambon (maigre) de telles sartreuses de Parme. Et l’egypto-italienne se double d’une Bernadette sous biroute voire de la Madeleine de Brel plus que Proust. Son corps idéal jouxte la mort et l’amour. Telle la mante religieuse, elle “exécute” ses maris. Telle l’amante trop religieuse, elle ne peut connaître que les amours ratées.
Dalida dans ce biopic semble d’abord un nuage aux robes de soie, une comtesse aux effluves de santal et aux épaules d’albâtre. Elle a la noblesse trouble des danseuses orientales et des siciliennes ombrageuses. Mais ce n’est qu’un début et tout se transforme en nougat (ce qui n’est pas gentil pour les confiseurs de Montélimar). Le fabrique à rêves — qu’un manager familial a imaginé comme machine à sous — exploite jusqu’à l’hallali toutes les ficelles du leurre kitsch. Alternent des suites de clip et de scènes compassionnelles faites pour pleurer Margot et son frère à l’identité incertaine.
La soupe racoleuse mélange choucroute laquée et croupion de dinde. Tout dégouline d’émotions frelatées. La Jocaste terrorisante devient la sainte des sans dents. Si bien que le prix des places devrait être remboursé par la Sécu : il inocule un vaccin consolatoire à la misère commune eu égard à celle éprouvée par la Bambina de Bambino.
Qu’importe si l’érotisme est grotesque : le tragique en tambour et trompettes répond aux aspirations plébéiennes selon un principe pompier. Le film — ou ce qui en tient lieu — ramène le mythe aux gogues et démagogues. Sous la poudre et le fard, c’est la Vénus à la fourrure qu’on assassine. Pour sa seconde mort, elle méritait sans doute mieux.
jean-paul gavard-perret
Dalida
Date de sortie 11 janvier 2017 (2h 04min)
De Lisa Azuelos
Avec Sveva Alviti, Riccardo Scamarcio, Jean-Paul Rouve plus
Genres Biopic, Drame