Pour André Markowicz, la forêt est lourde de significations et ramène à des réflexions nocturnes et trans-historiques. La forêt devient le lieu de culte de la maison des morts autant que celui des temps premiers et d’une « marche impaire » :
« corps jeté parmi les autres corps,
je suis fatigué, mais fatigué —
passe-moi tout doucement à gué,
dit le vieux »
Restent les épouvantes, les feux follets qui rythment la danse frissonnante des arbres et leurs coups portés sur l’horizon. L’orage gronde dans leurs gros bras, dans leur barbe qui parfois peut griffer. Si bien que, pour l’évoquer, Markowicz fait grincer les signes prêts à étouffer sous les plis des ombrages lourds. Les champignons sous les pas ont des couleurs d’opale. Ils rappellent la chair de ceux qui furent ensevelis.
« Reste. Reste encore.
Marche. Ça chuchote, ça frissonne,
ce qui passe glisse, me traverse ».
Pétries de boue et de limon, dans ce chemin, les jambes sont des porches. Ceux-ci ramènent à l’ombre au milieu des cierges des peupliers.
jean-paul gavard-perret
André Markowicz ‚ Un chemin en forêt, Editions Unes, Nice, 2017 — 120,00 €.