L’Atelier volant (Valère Novarina)

Une cri­tique acerbe de la société de consom­ma­tion dont le public, heu­reu­se­ment assoupi, ne voit pas le sens

 La scène est un pla­teau vide, éclairé par une dou­zaine de lampes, seule­ment orné en son fond d’un rideau peint par le met­teur en scène, aux motifs abs­traits mais pré­gnants sur fond noir. Le décor sera consti­tué durant toute la durée du spec­tacle d’éléments mobiles, modu­lables, qui se sépa­re­ront, s’assembleront, per­met­tront aux per­son­nages de dis­pa­raître ou de se chan­ger. Les acteurs se pré­ci­pitent pour s’entre-jeter leur réplique, sur un ton rapide, censé sans doute cal­quer le rythme des gestes atti­tudes auxquel(le)s ils sont astreints. Nous sommes sup­po­sés plon­gés au cœur d’une petite entre­prise, dont les cadences insup­por­tables donnent lieu à l’affrontement entre le couple diri­geant, assisté d’un « doc­teur » et les ouvriers, petit per­son­nel sou­mis au pou­voir de la pro­priété, de l’initiative, de l’argent, des mots finalement.

Las, il faut peu de temps pour per­ce­voir le carac­tère trop expli­cite, trop simple, trop direct de la cri­tique sociale qui est ici som­mai­re­ment pré­sen­tée. Et cet empres­se­ment per­ma­nent, bal­let effréné d’acteurs qui ne cessent de gueu­ler, de pié­ti­ner, ne cesse de ter­ras­ser le public de ses asseaux ver­baux. Le pro­pos, qui passe d’une dénon­cia­tion de l’aliénation des sala­riés à une cri­tique acerbe de la société de consom­ma­tion, se perd vite en élu­cu­bra­tion dont le public, heu­reu­se­ment assoupi, ne voit pas le sens. L’argument est gros­siè­re­ment mono­li­thique ; la verve lan­ga­gière propre à Nova­rina n’affecte pas encore, dans sa pre­mière pièce, le lexique. Les acteurs, braves, ne cessent de se débattre avec des situa­tions qu’ils ne maî­trisent pas. Ils sont réduits à des pro­li­fé­ra­tions inef­fi­caces. L’ombre d’une théo­rie de l’échec de la révo­lu­tion ne s’incarne que dans des élu­cu­bra­tions exu­bé­rantes dont les spec­ta­teurs finissent par pen­ser qu’elles ne valent même pas leur regard désinvesti.

chris­tophe giolito

 L’Atelier volant
Texte, mise en scène et pein­tures Valère Nova­rina
avec Julie Kpéré, Oli­vier Martin-Salvan, Domi­nique Parent, Richard Pierre, Myrto Pro­co­piou, Nico­las Struve, René Tur­quois, Valé­rie Vinci

 Théâtre du Rond-Point, du 6 sep­tembre au 6 octobre, durée 2h15.

Tous les jours à 21h. Relâche les lun­dis et le 9 septembre.

Col­la­bo­ra­tion artis­tique : Céline Schaef­fer ; scé­no­gra­phie : Phi­lippe Marioge ; musique : Chris­tian Pac­coud ; lumières : Joël Hour­beigt ; cos­tumes : Renato Bian­chi ; maquillage : Carole Anque­til ; dra­ma­tur­gie : Adé­laïde Pra­lon, Rosé­liane Gold­stein ; construc­tion du décor : Les ate­liers de construc­tion du Théâtre du Nord ; phi­lo­so­phie géné­rale : Clara Rous­seau ; régie géné­rale : Richard Pierre ; adap­ta­tion des lumières en tour­née : Paul Beau­reilles, en alter­nance avec Eric Ble­vin ; régie pla­teau : Raphäel Dupleix ; réa­li­sa­tion des cos­tumes : Syl­vie Lom­bart assis­tée d’Anne Pou­pe­lin ; réa­li­sa­tions des acces­soires : Jean-Paul Dewyn­ter ; sta­giaire — assis­tante à la mise en scène Mar­jo­rie Efther ; assis­tante de l’auteur : Lola Créïs ; pro­duc­tion : Séve­rine Péan en col­la­bo­ra­tion avec Carine Hily / PLATÔ.

 En tour­née : du  9 au 13 octobre 2012, T.N.P. Vil­leur­banne (69) ; le 17 octobre 2012, Scène natio­nale de Mâcon (71) ; les 23 et 24 octobre 2012, La Coupe d’or, scène natio­nale de Roche­fort (17 ; les 7 et 8 novembre 2012, Forum Mey­rin (Suisse) ; du 14 au 24 novembre 2012, Théâtre de Vidy-Lausanne, Suisse (relâche le 19 novembre) ; les 27 et 28 novembre 2012, espace des Arts, scène natio­nale de Chalon‑sur‑Saône (71) ; du 6 au 8 décembre 2012, Théâtre du Grand‑Marché, Saint‑Denis de la Réunion (97) ; du 16 au 18 jan­vier 2013, Comé­die de Saint‑Étienne (42) ; du 22 au 26 jan­vier 2013, Théâtre Dijon‑Bourgogne, Dijon (21) ; le 7 février 2013, Théâtre de l’Archipel, Per­pi­gnan (66) ; du 14 au 16 février 2013, Théâtre Garonne, Tou­louse (31 ; les 6 et 7 mars 2013, Le Maillon, scène natio­nale de Stras­bourg (67) ; les 12 et 13 mars 2013, Bon­lieu, scène natio­nale d’Annecy (74) ; u 19 au 22 mars 2013, T.N.B.A., Bor­deaux (33) ; les 4 et 5 avril 2013, Nou­veau Théâtre, C.D.N., Besan­çon (25).

Le texte de L’Atelier Volant est publié par P.O.L en 2010.

1 Comment

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One Response to L’Atelier volant (Valère Novarina)

  1. Laurent t

    Je trouve votre cri­tique bien reduc­trice
    face a l un des auteurs fran­cais les plus
    impor­tants de notre siecle : l ate­lier volant
    qu il a com­mence a ecrire a 27 ans et fina­lise a 29
    fit scan­dale a sa sor­tie et reste 40 ans apres d un redou­table
    rea­lisme qui derange.
    il me semble aussi que vous oubliez de mettre
    en exergue l incroyable per­for­mance des come­diens;
    Oli­vier Martin-Salvan en tete, fan­tas­tique patron d entr­prise
    frappa dingue entre Louis de Funes et Ricky Gervais.

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