Jasmine Le Nozac’h : les unes et les autres
Les femmes de Jasmine Le Nozac’h sont traversées par l’ondoiement de tissus aux troublantes transparences, aux déchirures soignées couvrant et dévoilant, éloignant et rapprochant, annulant soudain l’effet civilisateur du vêtement. En jaillit le questionnement sur la sexualité jamais vraiment apprivoisée, érotisant jusqu’aux lois qui viennent bannir. La dentelle ajourée voile un sein qu’elle révèle, offre et refuse ; l’étoffe, un magma d’objets comme tout autant un espace vide enserrent un visage voué à l’exigeante virginité des moniales ou à l’effroyable humilité des filles déshonorées.
Dans les tréfonds obscurs peut s’y chercher l’image d’une autre femme, qu’on aurait côtoyée peut-être du moins rêvée à l’évidence. Surgit le regard ambigu sur le statut non moins ambigu de la féminité dans une société avide toujours de cloisonnements et de pérennité. L’artiste nous donne à voir le travail de sape salutaire de la vraie liberté. Celle qui fonde et qui brise, celle qui révélée tend à occuper tout l’espace et faire le vide autour de soi – parfois pour mieux et paradoxalement se rapprocher de l’autre.
Contrainte à une nudité distante, la femme crée autour d’elle une inflorescence qui la prolonge et l’isole. Le doute se mue en certitude. L’inverse est vrai aussi. C’est comme une stance surréaliste qui habillerait de pudiques fioritures un sentiment trop humain.
jean-paul gavard-perret
Jasmine Le Nozac’h, Réouverture de l’atelier, 39 ruedeRoubaix, Lille.