Un récit qui vous prend aux tripes et qu’on ne lâche plus une fois entamé
Il faut trouver la voix !
Un serial killer encore plus givré que les autres, surnommé Vox parce qu’il cherche à voler la voix de ses victimes avant de les exécuter, sème la panique dans Paris. Une dizaine de trépas violents à son actif, il vient d’exécuter une animatrice de radio célèbre en suivant sa procédure habituelle : violer puis étrangler sa proie avec une corde de violoncelle en lui faisant prononcer des sentences qu’il enregistre sur micro-cassettes et place dans la bouche du prochain bouc émissaire. Invariablement une femme. Le commandant Axel Bruce a donc fort à faire pour suivre les traces de celui qui, depuis, nargue la Brigade Criminelle et ses experts (tel le profileur français Sagnac, expert en profil psychologique de tueurs).
Décision est prise alors d’offrir à Vox un appât en la matière de Martine Lewine, une femme flic ayant miraculeusement réchappé d’une agression commise par un sadique cinq ans plus tôt et aux intonations vocales qui ne peuvent que séduire le meurtrier. Aiguillé par les phrases qu’égrènent dans une litanie létale les victimes du sadique, Bruce découvre en même temps qu’il s’agit de renvois à une thèse prévalant dans certains romans de science-fiction : conviction selon laquelle dans le futur le corps disparaîtra tandis que seul perdurera une mémoire que les nanno-technologies seront capables de greffer sur un robot ! Ainsi paraît se déchiffrer la motivation des actes de Vox : devenir un être non-biologique fréquentant seulement une femme virtuelle, une “Idoru”. Les voix collectées par Vox sont à ses yeux l’ultime témoignage d’un stade révolu de l’humanité.
Quand exaltations sadomasochistes, biologie cybernétique, blagues carambaresques issues du “caramel méataphsique” et corps carbonisés s’en mêlent, le récit de Dominique Sylvain atteint son paroxysme. Et le commandant Axel Bruce entame véritablement, tel l’Orphée mythique de sa jeunesse qui suscita sa vocation, une descente aux enfers. Vox est un récit qui vous prend aux tripes et qu’on ne lâche plus une fois entamé. Fort bien documenté en matière de procédures criminologiques, le roman vous échappe tranquillement et vous entraîne dans le sillage de thrillers comme Le silence des agneaux ou Seven dont on sait la redoutable efficacité sur nos nerfs… De la belle ouvrage !
frederic grolleau
Dominique Sylvain, Vox, J’ai Lu, 282 p. — 5,50 €. Première édition : Viviane Hamy, mars 2000. |