Un nouveau détective aux multiples talents
Harry Houdini est célèbre pour ses multiples numéros d’escapologie. Surnommé Le Roi de l’évasion, il s’échappe de cellules, de malles, de jarres remplies d’eau. Né en Hongrie, Ehrich Weisz a pris le pseudonyme de Houdini en hommage au célèbre prestidigitateur français, Jean-Eugène Robert-Houdin (1805–1871). Vivianne Perret transforme l’escapologiste en enquêteur alors qu’il est au tout début de sa notoriété. Quelques mois auparavant il voulait tout abandonner. Ce sont ses numéros “d’évasion” dans les commissariats qui le lancent et amènent des spectateurs dans les salles où il se produit avec Bess, son épouse depuis cinq ans.
La romancière en lui faisant rencontrer la communauté chinoise de San Francisco expose la situation des migrants en cette année 1899. Depuis 1882, l’Acte d’exclusion interdit l’immigration chinoise. Celui-ci a pour effet la raréfaction des femmes dans les enclaves. La prostitution explose avec pour conséquence la nécessité de pourvoir les bordels en femmes. L’enlèvement et la vente de jeunes chinoises rapportent autant que l’opium et le jeu. L’image selon laquelle les USA est une terre d’accueil relève de la légende ou de fausses informations véhiculées par des nantis qui seront partout bien accueillis pour leur argent.
La sortie du cadavre d’un Chinois, des eaux du port de San Francisco occasionne un attroupement. Jim, un jeune mendiant, voit dans le groupe des curieux l’occasion d’exercer ses talents de pickpocket. Il remarque une superbe montre et, avec son complice, applique leur petit numéro bien rôdé. Mais il se fait repérer et poursuivre par l’homme. Celui-ci le rattrape et avoue lui avoir tendu un piège. C’est Harry Houdini qui cherche un assistant bien débrouillard pour sa prochaine prestation dans le commissariat principal de la ville. Ce nouveau numéro le fait surnommer le roi des menottes. Enchaîné par une dizaine de paires de menottes de toutes tailles, si lourdes que quatre hommes le portent dans une pièce totalement vide, il ressort dix minutes plus tard.
Son numéro fini, il discute avec le chef de la police qui lui glisse, très discrètement, une lettre qu’il empoche. Ils sont interrompus par le sergent Jesse Cook qui lui est présenté comme le policier chargé du quartier chinois, une des verrues de la ville impossible à éradiquer.
En rentrant à l’hôtel, Harry et Jim sont suivis par un jeune Chinois. Houdini l’aborde. Il travaille pour Ong Lin Foon, un riche marchand qui veut le rencontrer. La nièce de ce dernier a été kidnappée dès son arrivée en Californie. Il craint qu’elle ne soit aux mains d’une bande mafieuse qui gère un réseau de prostitution. En remerciement, il lui offrira un livre qui dévoile les tours d’un magicien chinois qu’Harry admire.
Poussé par Bess, sa jeune épouse, qui s’émeut des conditions atroces d’existence de ces malheureuses femmes, il accepte de rechercher cette jeune fille. Son action dérange les Tongs qui lancent sur sa piste un tueur très motivé par l’assassinat d’un Blanc…
Les Services secrets qui furent constitués pour contrer la criminalité qui menaçait la stabilité du pays ont été dirigés à partir de 1898 par John Wilkie, personnage mis en scène dans ce roman. Plusieurs faits font supposer qu’Harry Houdini accepta des missions pour ces services.
L’auteur détaille le cadre de son récit, fait revivre de façon précise l’atmosphère, l’ambiance qui régnaient à San Francisco à cette époque, une période où le gouverneur privilégiait les intérêts commerciaux de la ville, et donc les siens, au détriment de la sécurité, de la justice.
Avec Metamorphosis, Vivianne Perret offre un roman fort bien écrit, très documenté tant sur la ville où elle place son action que sur les acteurs authentiques du drame avec une intrigue passionnante pour sa montée en tension.
serge perraud
Vivianne Perret, Houdini Magicien & détective : Metamorphosis, Éditions du Masque, octobre 2016, 256 p. – 18,00 €.