Rendu possible par le Crowdfunding (financement participatif) et produit par La Brèche fondée pour le projet, Pornographisme est un hommage au cinéma de l’ombre, au cinéma X. Le genre est désormais antédiluvien par rapport aux productions qui naviguent sur le net. Ce livre se concentre sur des affiches particulières. En 1975, la loi française interdit l’usage d’images explicites sur les affiches de films pornographiques. Dès lors, les distributeurs doivent multiplier les chartes graphiques et linguistiques esthétiquement marquées pour attirer les spectateurs. Et le père de Mickaël Draï fut le dernier distributeur de films pornographiques sur bobine de 35mm. Son fils a donc hérité d’un trésor de 8000 affiches.
L’ensemble retenu propose une fantaisie graphiste et « poétique » de type surréaliste là où tout avait pour but la survie de ces petits cinémas croisés (entre autres) rue Saint Lazare en sortant du train de banlieue et avant de remonter vers Pigalle. Le graphisme est kitsch, un rien psychédélique (l’époque le voulait). Et les titres devaient inciter à pénétrer dans des salles obscures, véritables surfaces de « réparation ». « Sodomisations collectives », « Orgies au camping », « La Comtesse est une pute », « La grosse cramouille de la garagiste », « Les vieux sur la vieille » ou « Merlin l’emmancheur » et sa particulière quê(quê)te du Graal : il ne s’agissait pas de faire dans la dentelle mais dessous.
Et qu’importe si tout n’est pas bon dans le cochon. Il faut plutôt se fier ici à ses charcutières et ses charcutiers qui firent de leurs affiches les pierres d’appel de la pornographie qui sont parfois plus sûres que le béton armé de la spiritualité. De telles affiches s’opposent aux feux rouges. Une fois qu’on en a vu l’un d’eux, les ayant tous vu, on ne s’y arrête plus. Mais les roués du souffre et du souffle de la chair ont tout fait pour retenir le chaland. Reste de tout cela une belle pornostalgie. Avis aux (a)mateurs.
jean-paul gavard-perret
Mickaël Drai & Christophe Chelmis, Pornographisme, éditions Marque Belge, 2016.