Par graffiti, traces, glyphes, coulures, Cy twombly n’accueille le signe qu’insidieusement. Celui-ci est altéré, frappé du mutisme, de non-sens ou d’attente d’un sens à venir. Le peintre balafre ses œuvres en un geste qui à la fois désigne l’indéfini de toute attente et inscrit l’inarticulé qui, dans la mémoire inconsciente, demeure flottant, suspendu, assommé. Bref, il crée une sorte de langue éparpillée qui ne peut se lier mais signifie une présence.
Surgit le monde muet de l’injonction et de la résistance. La trace devient une énergie incorporée mais aussi dissipée où le plus récent et le plus archaïque se confondent. C’est pourquoi l’être – car il s’agit bien de lu en dernier ressort – reste empêtré dans la torpeur de cet inconscient qui le mine du dedans mais qui ébauche ici une tentative de redressement, de reconnaissance.
Du support au signe, de la matière à ses formes surgissent des relations lacunaires par un travail qui joint la pure agression à la lenteur scrupuleuse en un respect attentif des « éléments ». L’oeil ne commande pas. Ni la main, ni l’intellect, ni l’inconscient, ni une tradition plastique immergée et ressurgie. Néanmoins, tout est en fusion dans l’intervalle du vide et l’énergie de la matière plus ou moins « réconciliés ».
Chaque tableau s’impose comme un événement plastique impromptu mais décisif. Il met en œuvre matière et manière dans ce qui semble le fruit d’un tremblement mais ne doit son existence qu’à un acte de pure autorité.
jean-paul gavard –perret
Exposition Cy Twombly, Centre Pompidou à partir de novembre 2016 — avril 2017.
Oui Twombly accueille le signe insidieusement pour mieux en dégager la source .