Gérard Rancinan, Les baisers (exposition)

Les fée­ries gla­cées de Gérard Rancinan

Gérard Ran­ci­nan remet en cause la ques­tion du por­trait, du tableau de groupe et de l’identité par un tra­vail de fond à tra­vers des “occur­rences” iro­niques, lyriques et sou­vent déri­soi­re­ment gran­dioses. Elles prouvent com­bien — dans une pers­pec­tive qui n’est pas sans rap­pe­ler par­fois celle de Frida Kalho — le monde à tra­vers la mytho­lo­gie (du temps ou plus « immor­telle ») à la fois “s’envisage” et se “dévi­sage”.
Bou­li­mique de l’image, l’artiste mul­ti­plie ses scé­no­gra­phies selon diverse séries toutes par­fai­te­ment recon­nais­sables. Cha­cune pos­sède un mon­tage baroque où le réel est revi­sité — qu’il soit celui de l’histoire de l’art ou du monde — en des pers­pec­tives ciné­ma­to­gra­phiques. Mais pas n’importe lequel : il y a du Eisen­stein et du Fel­lini revi­si­tés en un uni­vers mor­ti­fère et glacé ou à l’envers bouillant sous les flammes d’enfers terrestres.

Chaque œuvre se fait mémoire tor­due, traces « déraillées ». Elle tra­vaille « de » l’apparence afin de créer à la fois un feu et une gla­cia­tion qui per­turbe notre regard et ses habi­tudes de recon­nais­sance d’un “modèle” ou d’une anec­dote. Ins­pi­rées par diverses réfé­rences autant par les stars (Mickael Jack­son, Elvis) que par le style (Louise Bour­geois, Spilliaert, Knoft, Ensor, Goya, Dau­mier, Dela­croix et l’on en passe), les dra­ma­tur­gies fomentent un céré­mo­nial rigo­riste en des évo­ca­tions proches du silence là où pour­tant le bruit et la fureur demeurent pré­sents. Par­fois le diable s’y habille de voiles.
Ran­ci­nan sou­ligne les gouffres sous la pré­sence et fait sur­gir des abîmes en ses fée­ries gla­cées. Il s’élève contre tout ce qui dans l’art pré­side au désastre crois­sant de l’imaginaire tout en fai­sant du chaos son dopage. L’expérience plas­tique engage le monde en une expé­rience inédite et plas­tique expres­sion­niste. L’artiste y réin­vente l’histoire de ses émo­tions pri­mi­tives. Nul besoin de pro­vo­ca­tion. Les tra­vaux par eux-mêmes s’en font l’écho en pas­sant de l’endroit où tout se laisse voir vers un espace où tout se perd (dans “l’écran”) pour appro­cher une post-renaissance noc­turne inci­sée de nou­veaux contours.

jean-paul gavard-perret

Gérard Ran­ci­nan, Les bai­sers– Love Sto­ries — Phau­tom­nales, octobre 2016 — jan­vier 2017, Beauvais.

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