Abstractrice de quintessence — par la « nature » pourtant réaliste du médium photographique -, Julia Amarger donne du relief à ce qui est infiniment perceptible et parfaitement inexplicable. Et si certaines de ses images de missives envoyées sont des machines à remonter le temps, elles ne peuvent fonctionner qu’en détraquant la présence effective sous forme de latence ou d’absence.
La photographie de Julia Amarger dans sa rigueur minimaliste devient la chose la plus rare et la plus mystérieuse qui soit. Demeurent les “ellipses et laps” chers à Denis Roche. La jeune créatrice propose en conséquence une autre solution à l’idée aristotélicienne d’identification. Ce qu’on voit est en dehors de soi, dans une forme d’objectivité plutôt que d’émotion même si chaque image ne parle que de sensation. Celle-ci ouvre à d’étranges trajets en un espace quasi désert.
Texte ou image créent leur propre perte et la dépossession de l’être face au monde. Ce qui remonte, proche du silence, devient pourtant plus strident qu’un cri. C’est le paradoxe d’un travail où “le silence parle encore le silence” (Michel Camus). Au moment où les mots se taisent, où les images se vident, la photographe va à l’extrême du soupir, en un lieu où le cliché, tel un fantôme, ramène au monde mais rayonne de son absence.
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jean-paul gavard-perret
Julia Amarger, Infiniment humain, exposition du collectif Diaph 8, Maison de la Photographie Robert Doisneau de Gentilly, Septembre-octobre 2016.