Adrien Tomas, Le Royaume Rêvé — t. 1 : “Le Chant des Épines”

Une tri­lo­gie qui démarre fort !

Adrien Tomas a fait sen­sa­tion avec la paru­tion de La Geste du Sixième Royaume (Mné­mos — 2012) qui raconte: “…avec un rythme effréné les des­ti­nées de  héros mal­gré eux, semées d’embûches, de pièges, de doutes, de décou­vertes ren­ver­santes et de magies insai­sis­sables.” Ce livre a obtenu le prix Ima­gi­nales 2012 du meilleur roman de fan­tasy. Avec Le Royaume Rêvé, il revient avec une nou­velle saga qui se déroule dans des temps bien anté­rieurs à La Geste.
Il y a une cen­taine d’années, les humains se sont révol­tés contre les Elfes qui régnaient en maîtres. Ils ont forcé les der­niers sur­vi­vants à se réfu­gier dans la Grande Forêt, au centre du conti­nent. Cepen­dant, ces der­niers ont laissé der­rière eux des abjec­tions, ou man­dra­gores, des gar­diens immor­tels qui génèrent une menace constante. Asgier, un vieux sclade pense avoir trouvé le moyen d’éradiquer ce mal. Il se heurte à Ver­mine, une gamine qui vit dans la forêt, habi­tée par Ténèbre qui lui donne des pouvoirs.

Vermine sème le chaos et se pense invin­cible. Elle est cap­tu­rée par une bande de sou­dards, sau­vée du viol par l’intervention de La Locuste, un mes­sa­ger étrange qui l’emmène à Sveld dans le clan dirigé par la prin­cesse Ithaen et son régent. Là, elle fait connais­sance des héri­tiers des clans vain­cus par les Svel­den il y a quelques années. Ceux-ci, pla­cés comme otages, sont entraî­nés, édu­qués pour deve­nir les Épines de la reine. L’objectif est d’unifier les clans sous une seule et même ban­nière, de paci­fier les terres et d’en faire un royaume rêvé, gou­verné avec sagesse.
Ver­mine ne pense qu’à s’échapper, mais chaque ten­ta­tive échoue, rat­tra­pée par La Locuste qui lui explique les erreurs qu’elle a com­mises et qui lui ont per­mis de la rat­tra­per, jusqu’au jour où…
Paral­lè­le­ment, Soro­mond, le sei­gneur d’Asreld, qui n’a tou­jours pas admis sa défaite, com­plote pour créer un sou­lè­ve­ment avec des clans séduits par sa pro­po­si­tion de reprendre la guerre. Et La Locuste entre­tient des rela­tions pour le moins douteuses…

L’auteur mêle avec brio intrigues poli­tiques, stra­té­gie, des­tins indi­vi­duels, magie, monstres inquié­tants… Adrien Tomas alterne les cha­pitres dont cha­cun se concentre sur un pro­ta­go­niste dif­fé­rent. Ce tome pré­sente, dans sa pre­mière par­tie, une longue intro­duc­tion pré­sen­tant le décor, les prin­ci­paux per­son­nages qui vont faire vivre l’intrigue. Et ils sont nom­breux, l’auteur n’hésitant pas à ani­mer une gale­rie de pro­ta­go­nistes consé­quente. Parmi cette pléiade d’acteurs, on s’attache par­ti­cu­liè­re­ment à Ver­mine pour sa fraî­cheur, son bon sens, son carac­tère brut non façonné par une édu­ca­tion, ses réac­tions spon­ta­nées.
Adrien Tomas pro­pose un sys­tème socié­tal ori­gi­nal avec ces héri­tiers des prin­ci­pau­tés nor­diques qui sont à la fois otages et atouts d’un pou­voir acquis de haute lutte. Ce pre­mier volume s’attache essen­tiel­le­ment aux clans qui peuplent Les Marches du Gel. Ces ter­ri­toires ont été occu­pés, après la vic­toire sur les Elfes, par quatre clans prin­ci­paux pro­té­geant des clans vas­saux. Mais, la nature humaine étant ce qu’elle est, très vite des luttes pour étendre leur pou­voir se sont fait jour entre les clans, ces que­relles dégé­né­rant en guerres. Après un conflit oppo­sant le clan Asrel­sen aux trois autres, le clan Svel­sen est devenu le clan domi­nant.
Mais, au-delà du récit de fan­tasy, l’auteur fait pas­ser des mes­sages en concor­dance avec la situa­tion d’aujourd’hui. Ainsi, il réin­tro­duit dans quelques cha­pitres le Pro­jet 68 où un arti­san, un inven­teur de génie est jugé par une sorte d’inquisition. Il se défend en argu­men­tant : « Que lorsqu’une loi est trop vieille pour faire sens dans un monde moderne, elle devient obso­lète. Il est du devoir du légis­la­teur à veiller à expur­ger ces règles, et s’il en est inca­pable, il est de celui du citoyen de les igno­rer. »

Une fois lan­cée, l’action pas­sionne et cap­tive jusqu’à un dénoue­ment qui, bien sûr, laisse sur sa faim, puisque le récit se pour­suit dans les deux tomes à venir.

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serge per­raud

Adrien Tomas, Le Royaume Rêvé, t. 1:  “Le Chant des Épines”, Mné­mos, août 2016, 304 p. – 19,00 €.