Olivier Cadiot, Histoire de la littérature récente, tome 1

L’écri­ture du désastre sonnant

Esso­rant les mots à la recherche d’une « auto­bio­gra­phie de tout le monde » (G. Stein), polis­sant les mots pour qu’ils deviennent galets, Oli­vier Cadiot cherche par­fois trop à être jar­di­nier « moder­niste » afin de labou­rer le lan­gage selon une pra­tique détour­née. Il crée une œuvre for­melle par­fois pro­bante. Par­fois pom­peuse plus que désar­çon­nante.
Cadiot n’a tou­jours pas tout digéré son Barthes. La puis­sance de frappe et l’ouverture « comique » de son feuille­ton res­tent sou­vent vœux pieux. Mais il y à là du cou­rage. Typo­gra­phies et espaces découpent la page pour une dégé­né­ra­tion qui n’est pas neuve : son « cut » poé­tique et réflexif vient direc­te­ment de la poé­sie amé­ri­caine et des exer­cices à trous là où l’auteur fait rejoindre « Lucrèce et le Bled », les défen­seurs de Bal­zac et ses détrac­teurs. Voire. Ne vou­lant pas faire His­toire il fait des his­toires contre les décli­nistes mais sans se poser en par­fait contraire.

C’est sans doute ludique mais ça ne mène pas trop loin. Cadiot est à l’essai ce que Bou­te­flika est devenu au dis­cours poli­tique. Son mini­ma­lisme ne pro­duit pas for­cé­ment l’élucidation au sein de son opus à suivre. Concep­tua­lisme et masse s’associent pour une autre his­toire (réjouis­sante ?) de la lit­té­ra­ture. Mais il demeure dif­fi­cile de lier farce et théo­rie.
L’édifice historico-poétique devient un châ­teau mais autant éloi­gné de celui de Kafka que de B. Noël. Son dis­po­si­tif per­met d’introduire d’une autre manière du « men­songe » dans la fic­tion. Etant elle-même men­songe, elle per­met d’annuler ce der­nier selon la for­mule algé­brique : — + — = +. Le canu­lar se veut jubi­la­tion contre les doctes qui mul­ti­plient leurs « congères, leurs cakes de pois­sons ». N’est pas Perec qui veut. Le for­mel et le joyeux réclament une sorte d’ascèse dont l’auteur n’est peut-être l’athlète.

jean-paul gavard-perret

Olvier Cadiot, His­toire de la lit­té­ra­ture récente, tome 1, P.O.L édi­teur, Paris, 2016, 192 p. — 11,00 €.

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