Ce livre est le dit de l’enfance. Pas n’importe laquelle : celle d’un pensionnat de jeunes filles tenues par les sœurs en un temps qui est sans doute révolu (du moins on l’espère). L’éducation y était rigide : ce qui — avantage — permet aux filles madrées d’apprendre la désobéissance. Mais il n’empêche, hors nostalgie, ce temps d’internement plus que d’internat fut celui des pilules à mères (supérieures ou non).
Anne Létoré trace un portrait sans concession du lieu de rétention qui tendait à abolir le « je » pour un collectif des plus douteux mais où se construisent de sourds complots susceptibles de mettre l’ordre en désordre. Les filles cloîtrées y subissaient l’orgue à prière spongieux des accents suspects d’Hildegarde Von Bingen, rock star post-mortem des sœurs qui ne sont pas forcément bonnes.
L’auteur rappelle l’hypocrisie d’une telle closerie : les différences sociales y demeuraient présentes mais déjà une sensualité et des amours particulières (faute de mieux) y trouvaient des ferments. Il n’empêche : le lieu ressemblait à un jardin des Oliviers pour fillettes. Une seule conversion malencontreuse, une mystique de bazar jetaient dans la peur voire l’effroi.
Françoise Lison-Leroy lui emboîte le pas ou en remet une couche. Chez les deux, la rage rôdait. La rébellion idem. A leurs semblables et aux sœurs, elles rappellent aux premières leurs frustrations aux secondes leurs certitudes faites pour dresser leurs « brebis d’abattoir ». Quant au dessin, il rappelle les uniformes du lieu propre à soigner les brebis galeuses. Mais en guise de révolte, il existait les maillots de bain (une pièce) annonciateurs d’un dehors, sorte d’ode à une rébellion dont les trois femmes se font les chantres.
jean-paul gavard-perret
Anne Létoré, Françoise Lison-Leroy & Emilia Jeanne, Tabliers et maillots de bain, Merlin, Déjeuners sur l’Herbe, 2016, 86 p.
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