Céline Walter, L’inconnue de la Seine

Choi­sir sa chute

Céline Wal­ter pour­suit une œuvre fas­ci­nante. Evi­tant le pathos, la han­tise de l’existence jaillit selon des for­mu­la­tions sin­gu­lières et sombres. La noir­ceur rôde au sein d’une alchi­mie poé­tique qui ne donne pas for­cé­ment les clés du secret de l’existence intime de l’auteur. Il était en par­tie levé dans son livre pré­cé­dent : « Petite / C’est la fête, tu vou­drais mou­rir. »
Sai­sis­sant à nou­veau sa propre enfance mais la por­tant vers d’autres évo­ca­tions, la poé­tesse tente de renon­cer à l’oxymorique « joie immonde » du passé. Tou­te­fois, la mémoire per­siste et les trompe-l’œil du pré­sent ne changent rien à la donne. Au contraire. Le pas­sage par l’inconnue de la Seine (sous formes de trois corps de pierre ou de chair) non plus. C’est la poé­tesse. C’est nous. Cha­cun saute et saigne à sa façon. Dans l’espérance. De finir noyé. Le tout est de choi­sir sa chute.

La poé­tesse conti­nue à explo­rer les îles inté­rieures qui flottent un temps et tentent de résis­ter à la déré­lic­tion comme si l’imagination au seuil de la mort ima­gi­nait encore, en fidé­lité à l’injonction de Beckett. Mais l’état de vul­né­ra­bi­lité demeure même si une pers­pec­tive de sau­ve­tage est pos­sible, non sous, mais sur le gris du fleuve là où per­durent des pré­sences pre­mières. Elles tirent par les pieds et pèsent sur l’état des sen­sa­tions et des sen­ti­ments.
Une fois encore, Céline Wal­ter tente de recons­truire le temps — cyclique ou linéaire - au sein du manque, des lacunes et des inhi­bi­tions.
Demeure donc la souf­france exis­ten­tielle, méta­phy­sique. Avec cette fusion avec cet autre soi-même qui était déjà pré­sent dans le pre­mier livre où faire un choix sem­blait déjà impos­sible. Quit­ter le vieux moi était pour­tant la condi­tion de la seconde (et bonne) nais­sance en fai­sant abs­trac­tion de la pureté, la naï­veté de l’enfance.

En un por­trait démul­ti­plié, la poé­tesse retrouve sa mai­son de l’être au fil de l’eau. Il devient l’aître des limbes loin­tai­ne­ment fami­lières dans l’embellie d’une sur­face inap­pro­chable et chan­ce­lante. Un temps, le temps se couche sur les inter­mit­tences du mys­tère. Tout tremble, chuinte d’inassouvi. Lueur, bruis­se­ment, rêve d’une mort assez vaste et pro­fonde. On croît resur­gir à la réa­lité sau­vage.
Il n’y a per­sonne et pour­tant quelqu’un s’égare en soi. Une double mémoire appa­raît : dans le bras­sage des eaux quelqu’un parle avec la voix de la poé­tesse, s’en empare pour vivre son absence « programmée ».

jean-paul gavard-perret

Céline Wal­ter, L’inconnue de la Seine, Edi­tions Tituli, Paris, 2016.

1 Comment

Filed under Poésie

One Response to Céline Walter, L’inconnue de la Seine

  1. plè claudine

    je trouve vrai­ment geniale et avoir lu seule­ment un extrait­car notre poe­tesse ecrit ses poeme avec son ima­gi­na­tion ses fait de tous petite ses rire ses angoisse et ecrit avec ses propre terme sans tri­cheri en fait cest la suite de sont pre­mier receuil et se qui est mer­veilleux c est mon opi­nion per­son­nel vous pou­vez lire et relire les poèmes il vous­semble comme un film de la rea­lite a haut de la peut etre du pos­sible mais tous nos féli­ci­ta­tions une fan de poesie

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