Antoine Boulant,Les Tuileries. Château des rois, palais des révolutions

Le des­tin man­qué d’un palais royal

Le palais royal des Tui­le­ries a été incen­dié par les com­mu­nards en mai 1871 puis rasé par la IIIe Répu­blique. Comme si ces outrages ne suf­fi­saient pas, son sou­ve­nir a som­bré dans l’oubli. Il n’en reste plus qu’un jar­din appré­cié par les Pari­siens et deux pavillons qu’on attri­bue faus­se­ment au Louvre.
Le très utile livre d’Antoine Bou­lant brise cet oubli en res­ti­tuant, dans un style clair et fort agréable, l’histoire de ce palais qui est aussi celle de notre pays. Tout com­mence sur des champs en dehors de Paris où se sont ins­tal­lées des fabriques de tuiles. Cathe­rine de Médi­cis vou­lut y bâtir une rési­dence autour d’une cour inté­rieure, pro­jet qu’elle lança et que reprit Henri IV en le modi­fiant en faveur d’un palais construit « sur un même ali­gne­ment per­pen­di­cu­laire à la Seine » et direc­te­ment relié au Louvre.

A par­tir de là, plu­sieurs sou­ve­rains impri­mèrent leur marque sur le palais, l’agrandissant en direc­tion du nord avec le pavillon du théâtre, la gale­rie des machines et le pavillon de Mar­san dus à Louis XIV. Les Tui­le­ries auraient pu alors deve­nir le centre du pou­voir mais Ver­sailles leur vola la vedette !
Louis XV y fit de brefs séjours et il faut attendre le ter­rible retour de Louis XVI dans la capi­tale en octobre 1789 pour voir les Tui­le­ries sor­tir de leur léthar­gie et de leur déla­bre­ment. Dès lors, le palais subit les affres de la vie poli­tique plus que tour­men­tée que connaît la France jusqu’en 1871 : deux fois envahi et sac­cagé avant d’être incen­dié. Pour autant, il retrouva, notam­ment avec Napo­léon III, un pres­tige étin­ce­lant, une vie de Cour et un rôle à sa mesure.

Son incen­die, décrit en détails par l’auteur (ainsi que la sai­sis­sante et san­glante prise du châ­teau le 10 août 1792), consti­tue un crime contre l’art et le patri­moine, l’expression très nette de la rage éra­di­ca­trice des révo­lu­tion­naires qui s’acharnent sur les bâti­ments avant de le faire sur les hommes. Sans doute est-ce pour cela qu’on son­gea à le recons­truire dans les années sui­vantes et qu’une véri­table nos­tal­gie s’exprime de nos jours. Sur ce point, on ne peut que suivre l’analyse de l’auteur. Si la recons­truc­tion n’est pas envi­sa­geable, il faut en entre­te­nir le sou­ve­nir.
Ce livre y aidera beaucoup.

 fre­de­ric le moal

Antoine Bou­lant, Les Tui­le­ries. Châ­teau des rois, palais des révo­lu­tions, Tal­lan­dier, juin 2016, 333 p. — 21,90 €.

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