Il existe toujours des accrocs dans la soierie du voyage d’un être. Natyot n’échappe pas à la règle. Il se peut même qu’un ogre l’ait tirée par les pieds et que, malaxant sa terre pure, il voulut planter sa tente. Devant sa grotte, il paradait en habit d’officiant. Mais il y a belle lurette que la poétesse ne croit plus aux orgues à prières. Au latin de cuisine, elle préfère son propre gazouillis qui devient parfois lourd d’orage, d’opprobre, de drôlerie et de self-défense.
De dieu, Natyot ne redoute plus le tonnerre ni de ceux qui poussent à un certain jeu social et qui respectent ce qu’elle déchire (à savoir une certaine syntaxe) : « je vais pas y aller se matin. Je leur dirai je sais pas la tête ou n’importe quoi d’autre. Une impossibilité ça se trouve ». Et c’est même nécessaire. Il convient, par étape, de quitter un théâtre masochiste. Aux scènes domestiques peut se substituer un univers autre que celui de la grotte, de la chapelle ou encore des supermarchés même si la créatrice n’y achète que « des marques connues, des marques chères pour se respecter ».
Dès lors, si tout n’est pas bon dans le cochon, tout le sera chez la charcutière du logos. Exit les soumissions de femme, de maman, d’une putain dont on mutile l’urne par ce qu’on la croit en flammes. Mais c’est connu : « on » est un con. Personne ne peut donc contraindre celle qui n’a pas encore été mais qui devient en tordant le cou au « si je suis de Beckett ».
La performeuse ne pâtira donc plus des interdits. Tout s’en imposant une injonction majeure : proposer une création particulière, ignorante des sentiers battus, réveilleuse des morts. Elle donne du courage, et accessoirement dégrafe les corsages mais uniquement lorsque c’est choisi afin de traverser en robe légère l’été.
jean-paul gavard-perret
Natyot, Je n’ai jamais été mais il est encore temps, Editions Gros Textes, Fontfourane, 2016, 44 p. — 10,00 €.