Eichmann à Jérusalem (Lauren Houda Hussein / Ido Shaked/théâtre Majâz)

La res­ti­tu­tion de l’impossible ne sau­rait être que par­cel­laire et fragmentée
On entend une voix enre­gis­trée, qui parle dans une langue qui n’est pas sa langue mater­nelle. Dans un brou­haha, la troupe s’installe avec aisance et natu­rel sur la scène. Eich­mann s’identifie et déve­loppe son témoi­gnage, pro­saïque et objec­tif. Les comé­diens disent ce qu’ils sont cen­sés faire ; on assiste par­fois à un che­vau­che­ment des paroles et de leur tra­duc­tion. Les comé­diens changent de rôle, s’appuient sur des sché­mas, font inter­ve­nir des témoi­gnages, inter­prètent des mor­ceaux de cor­res­pon­dance.
Sur le plan­cher de la scène sus­cep­tible de vaciller, sont tra­cés suc­ces­si­ve­ment un plan de Sobi­bor, un orga­ni­gramme des ser­vices de dépor­ta­tion. La spon­ta­néité affi­chée par les pro­ta­go­nistes du pro­cès met à jour le pro­ces­sus dif­fi­cile d’une recons­ti­tu­tion cryp­tée, extrapolée.


O
n est en effet ins­crit dans l’ordre du sym­bo­lique. On n’appréhende les mas­sacres que de façon biai­sée, comme abs­traite. Car il s’agit bien de sai­sir le réel par où il se dérobe, comme à tra­vers un trou noir. La res­ti­tu­tion de l’impossible ne sau­rait être que par­cel­laire et frag­men­tée. Le spec­tacle a les qua­li­tés de ses défauts : il est mono­li­thique, un peu mono­tone, pesant, mais édi­fiant.
Il y a certes des varia­tions de teneur, entre les des­crip­tions som­mai­re­ment nar­ra­tives de l’horreur et les cri­tiques un rien spé­cu­la­tives de Gers­hom Sho­lem. Mais le choix du pro­saïsme condamne à une dra­ma­tur­gie limi­tée, que les para­doxes de la mons­tra­tion impos­sible ne peuvent étof­fer. A terme, une voix off sus­cite de nou­veau le doute : notre mémoire n’est ren­voyée qu’au kaléi­do­scope de ses reflets fuyants.

chris­tophe giolito


Eich­mann à Jéru­sa­lem 

ou
Les hommes nor­maux ne savent pas que tout est possible

Texte de Lau­ren Houda Hussein

Mise en scène Ido Shaked/théâtre Majâz

Avec :

Lau­ren Houda Hus­sein, Sheila Maeda, Caro­line Pan­zera, Mexia­nou Mede­nou, Raouf Rais, Arthur Via­dieu, Charles Zevaco

Dra­ma­tur­gie Yaël Perl­man ; lumière Vic­tor Aran­cio ; lumière Vic­tor Aran­cio ; son Thi­baut Cham­pagne ; cos­tumes Sara Bar­te­sa­ghi Gallo ; scé­no­gra­phie Théâtre Majâz avec l’aide de Vincent Lefevre ; assis­ta­nat à la mise en scène Clara Benoit-Casanova ; typo­gra­phie Sta­te­ment ID Franck David, Phi­lippe Mai­resse, Adrien Vas­quez.
Les décors ont été réa­li­sés par les ate­liers de construc­tion du Théâtre Gérard Philippe.

Pro­duc­tion Théâtre Majâz — Copro­duc­tion Théâtre Gérard Phi­lipe, Centre dra­ma­tique natio­nal de Saint-Denis — ARCADI — Minis­tère de la Culture et de la Com­mu­ni­ca­tion – DRAC Île-de-France — Conseil géné­ral de la Seine-Saint-Denis dans le cadre du dis­po­si­tif In Situ et la par­ti­ci­pa­tion des Archives Natio­nales de Pierrefitte-sur-Seine et du stu­dio théâtre d’Alfortville.

Pour l’écriture du spec­tacle, le théâtre Majâz a tra­vaillé à par­tir des minutes du pro­cès, de textes de Haïm Gouri, de Han­nah Arendt, de Gers­hom Scho­lem, d’Avner Less et du film Un spé­cia­liste. Por­trait d’un cri­mi­nel moderne réa­lisé par Eyal Sivan et Rony Brauman.

Au TGP THÉÂTRE GÉRARD PHILIPE CENTRE DRAMATIQUE NATIONAL DE SAINT-DENIS

(59, bou­le­vard Jules-Guesde,93200 Saint-Denis, salle Mehmet-Ulusoy)

du 9 mars au 1er avril, du lundi au samedi à 20 h, dimanche à 15 h 30

relâche le mardi et le lundi 28 mars.

Durée : 1 h 30. Tarifs : de 6 à 23 €. Réser­va­tions : 01 48 13 70 00 ;

reservation@theatregerardphilipe.com

http://www.theatregerardphilipe.com/cdn/eichmann-a-jerusalem

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