Il y a dans les gravures de Jean Cortot, quelles qu’en soient la densité d’encre et de pression, un vœu de transparence, une secrète dimension d’éternité à travers les portraits que l’artiste propose. Il rend pathétique toute tentative de représenter le réel ou d’en rendre compte par une image simplement ressemblante. Le geste de création qui enflamme la matrice vierge fait bien plus : il imprime la trace d’une absence.
A défaut de connaître la paix, Jean Cortot rencontre par ses fouilles un éclat : c’est comme un nerf dur devenu empreinte contre la vitesse du temps. S’exprime « objectivement » un sentiment à l’unisson des grands rythmes telluriques des artistes qui nous dépassent. Leur monde pourtant lointain est le plus proche de nous. Et Cortot entretien la sidération qui naît de ce hiatus, de cette cavité. Nous en sommes les témoins, les otages au moment où le créateur projette de l’autre côté du réel sans pourtant nous décoller du socle terrestre.
S’y éprouve une nudité particulière. Ou plutôt le total dépouillement jusqu’à l’abandon et l’acceptation dans la fusion du monde avec l’indicible. Les gravures de Cortot déplient le réel sans jamais s’y soumettre. Elles portent en elles les signes de la défaillance de la matière comme sa sublimation. D’où le vertige des couleurs et des volumes.
jean-paul gavard-perret
Jean Cortot, Anthologie inachevée, Exposition du 11 décembre 2015 au 6 février 2016, Galerie Maeght, Paris.