Le républicanisme ne serait-il donc qu’un vernis ?
En 2014, le livre Les derniers jours des rois, dirigé par Patrice Gueniffey connut un succès éditorial des plus mérités. On y découvrait le contenu politique de la mort des souverains, véritable mise en scène rappelant que jusqu’au bout le roi s’offre au public. C’est donc avec grand intérêt qu’on lit Les derniers jours des reines, écrit sous la direction de Jean-Christophe Buisson et Jean Sévillia, lesquels ont rassemblé les meilleurs plumes pour décrire la manière dont plusieurs souveraines, de différentes époques et de différents pays, ont affronté la mort.
Même en France où la malheureuse loi salique écarte les femmes du trône, la reine participe à l’exercice du pouvoir, par l’influence, la régence ou tout simplement parce qu’elle demeure un symbole de la monarchie. Le destin tragique de Marie-Antoinette mais aussi de l’impératrice Alexandra Fedorovna le prouve. Honnies par leur peuple, piètres politiques, voire mauvais génies de leur époux, elles affrontèrent la mort avec une dignité exemplaire. Certaines payèrent de leur vie l’exercice du pouvoir ou leur soif de pouvoir (Cléopâtre, Draga de Serbie, Marie Stuart ou Brunehaut).
D’autres eurent un sort plus enviable et moururent de vieillesse après avoir gouverné leur pays dans les affres de la guerre civile (Catherine de Médicis, Anne d’Autriche). Certaines préfèrent le retrait, voire la mélancolie (Elisabeth d’Autriche et Eugénie de Montijo), avant que la folie ne les saisisse (Charlotte de Belgique). Ce que montre en fait ce livre passionnant, c’est que le pouvoir n’est pas l’apanage des hommes, et que des femmes peuvent l’exercer avec autant de poigne et de volonté qu’un roi (Marie-Thérèse d’Autriche, Catherine II de Russie). Mais elles doivent alors affronter la jalousie, y compris celle d’un fils impatient de régner.
Jean-Christophe Buisson et Jean Sévillia, dans leur introduction, notent l’intérêt que suscitent encore aujourd’hui, y compris dans la France républicaine, la monarchie et l’histoire de ceux et de celles qui l’ont incarnée. Le républicanisme ne serait-il donc qu’un vernis ? La monarchie serait-elle plus attractive ? Plus humaine parce qu’organique ? On cherchera en vain une Première dame aussi populaire que l’est aujourd’hui Marie-Antoinette ! Belle revanche sur celle qui subit son martyr avec une dignité qu’elle ne sut pas avoir dans son rôle de souveraine.
Ces personnes savent mourir.
frederic le moal
Jean-Christophe Buisson é Jean Sévillia (dir.), Les derniers jours des reines, Perrin-Le Figaro Histoire, octobre 2015, 398 p. — 21,00 €.