Philip Le Roy, L’Origine du monde

La grande arnaque des phallocrates

Les textes sur les­quels se basent les reli­gions mono­théistes ont d’abord fait l’objet de trans­mis­sions orales avec toutes les alté­ra­tions que l’on connaît pour ce type de mes­sage. Puis, les pre­miers écrits, dans des langues presque dis­pa­rues, ont été tra­duits, repris, copiés et reco­piés tant de fois que la pro­ba­bi­lité d’erreurs fon­da­men­tales, sans même pen­ser à des mani­pu­la­tions volon­taires, est à son maxi­mum. Aujourd’hui, des éru­dits impar­tiaux tra­vaillent, avec les nom­breuses décou­vertes récentes et l’apport de tech­no­lo­gies avan­cées, sur ces textes et apportent un éclai­rage nou­veau.
C’est en s’appuyant sur ces tra­vaux dif­fu­sés encore de façon confi­den­tielle que Phi­lip Le Roy concocte les intrigues de son cycle roma­nesque dédié aux livres sacrés. Après le Coran, dans La Porte du Mes­sie, il pro­pose une autre lec­ture des textes fon­da­men­taux des trois grandes reli­gions mono­théistes : judaïsme, chris­tia­nisme et Islam.

Dono­van Kane, le numéro deux d’Escorp est dans le désert où ses équipes ont exhumé un inci­pit rédigé en syriaque. Le plus trou­blant est cette carte mémoire insé­rée dans ce docu­ment dûment authen­ti­fié du VIe siècle. Elle contient deux vidéos. L’une semble datée du temps de Jésus, l’autre d’un temps… à venir. Maxime Gau­thier est sur les traces de deux femmes voi­lées depuis presque quatre mois. Il se rap­proche mais son périple res­semble à une com­pi­la­tion, quasi exhaus­tive, des voyages en médi­ter­ra­née. Il traque Sab­bah Shahi, une franco-syrienne de trente ans. En com­pa­gnie de Simon Lange, un faux Mes­sie, ils ont pris, dans la secte des Naza­réens, trois docu­ments excep­tion­nels prou­vant la mani­pu­la­tion du Coran. Lange a été abattu lors de sa fuite. Mais Maxime com­prend, par le témoi­gnage d’un méde­cin tuni­sien, que Simon se cache sous le voile de la femme qui est avec Sab­bah. Celle-ci, aidée par un réseau de contacts consti­tué quand elle tra­vaillait à l’UNESCO, veut échap­per aux naza­réens qui ont fait alliance avec Escorp, une des plus impor­tantes socié­tés mili­taires pri­vées de la pla­nète.
Fait pri­son­niers, le couple est déli­vré par Maxime. Celui-ci se pré­sente comme un archéo­logue vou­lant par­ti­ci­per à l’écriture du témoi­gnage com­mandé par Sab­bah, à un roman­cier, lors d’un Salon du livre en Corse. Au terme d’une cavale effré­née, ils se réfu­gient parmi les membres de la Confré­rie du Ser­pent, un groupe de sages, gar­diens de la connais­sance ori­gi­nelle et uni­ver­selle. Mais, sans le savoir, Sab­bah a amené Le Mal sur place et les tra­hi­sons, meurtres, vols se suc­cèdent à un rythme accéléré.

On retrouve avec grand plai­sir Sab­bah et Simon, le couple de héros de La Porte du Mes­sie (cherche midi – 2014). Avec ces per­son­nages hors normes, cette héroïne intré­pide, volon­taire, opi­niâtre, cet anti­hé­ros superbe dans son mal-être venu de la décou­verte de son passé, Le Roy construit une his­toire dans l’Histoire, une quête spi­ri­tuelle et, ô com­bien !, mou­ve­men­tée vers une vérité dis­si­mu­lée depuis l’aube de l’homme moderne. L’auteur se met en scène en pré­sen­tant ses livres comme la com­pi­la­tion des notes que lui aurait remis Sab­bah. Est-ce le hasard qui a conduit à don­ner à ce livre un titre iden­tique à celui d’un célèbre tableau long­temps dis­si­mulé, mais qui illustre bien la même réa­lité ?
Riche en apports his­to­riques, lin­guis­tiques, géo­gra­phiques, reli­gieux, et en actions (la fuite en avion est une mer­veille du genre), l’intrigue “au cor­deau” donne des clés pour mieux com­prendre les mani­pu­la­tions qui ont amené à mettre au ban de l’humanité plus de la moi­tié d’entre elle : les femmes.

serge per­raud

Phi­lip Le Roy, L’Origine du monde, cherche midi, coll. “Thril­lers”, sep­tembre 2015, 496 p. – 19,80 €.