Porno Graphique ne peut se lire sans sa loupe. Le texte est en effet imprimé en corps 4… C’est pourquoi chaque exemplaire est enrichi d’un globe de verre. Tiré à 69 exemplaires (ne pas y voir d’allusion superfétatoire : il s’agit simplement de l’année de naissance de l’artiste), le texte se veut avant tout l’éloge du secret et enlève à la pornographie son effet étal de boucher ou déballage outrancier. Manière de remettre le genre ailleurs que dans le tout– venant et la dilapidation ostentatoire.
Serré dans la graphie de sa peau, ce récit d’une voix prouve que certaines choses peuvent être la surface de toutes autres sauf elles. Dès lors, le texte avance dans son mont( r)age comme hors cours ou hors limites. La loupe, le traversant, en suit les échos, attrape l’œil pour élever les images. La lecture devient une fouille de ce que le corpus retient tout en disant : « entrez ». Dans le cercle du corps, dans l’origine du monde. Manière de rendre habitable ce qui est souvent vu ou lu comme contours.
Le défilement par effet de loupe n’étant plus synchrone avec la surface première, la lecture se fait par sursauts visuels dans le glissement du verre sur la page. L’œil est donc « obligé » de se jeter dans le globe qui, la main glissant, en ouvrant transperce même si le texte garde son « corps ». La loupe contient alors ce qu’elle ne peut contenir. Au concave s’oppose le convexe par le cerclage. Passant en ce qui est d’abord empêché, se prépare le feu d’ici voir.
jean-paul gavard-perret
Marie-Laure Dagoit, Porno Graphique, Editions Derrière la Salle de Bains, Rouen, 2015, 110 €.
ravie de lire cet article que je découvre…je viens d’en avoir un ce jour…