Qu’il est joli le retour des pirates !
Trois adolescents, Maria, Emilio et Raffy sont entraînés dans une succession d’aventures où ils doivent faire preuve de courage, de ténacité pour rester en vie. La première appartient à la noblesse espagnole, le second est son serviteur qui revêtira des vêtements féminins pour échapper à la mort. Le troisième est le fils de Blackdog, le pirate qui arraisonne un navire pour s’emparer du Kashar, un fabuleux diamant, aux pouvoirs maléfiques, en possession des parents de Maria.
Quelques années plus tard, Raffy, blessé, est aux mains de Fine Flamme, une prostituée amoureuse de lui devenue gouverneure de l’île de Puerto Blanco. Elle veut se venger et le livrer aux Espagnols. Emilio et Maria sont sur les traces de Blackdog, le seul à savoir où il a caché le diamant. Celui-ci est prisonnier des Moori, des cannibales. Il est torturé par Penilla, le sorcier, qui veut la pierre précieuse pour la rendre à son roi. Il résiste, mais pour combien de temps…
Les principaux antagonistes de l’histoire se retrouvent pour continuer leur course, n’hésitant pas à chercher à se défaire, par tous les moyens, de ceux qui se trouvent sur leur chemin. Mais cette volonté est tempérée, est freinée par des sentiments contradictoires qui les amènent à infléchir leur quête.
Jean Dufaux donne vie à des héros singuliers et à des héroïnes intrépides courageuses, dans la lignée des grandes aventurières. Il brosse une galerie de personnages animés par les pires et les meilleurs sentiments, mêlant amour, vengeance, ambition, cupidité, traitrise… Avec un art consommé du récit, le scénariste noue le destin de ses protagonistes dans une histoire dense, intense.
Avec cette série, l’auteur renoue avec bonheur avec l’aventure maritime, l’univers des pirates et autres détrousseurs des mers, retrouvant l’atmosphère de romans tels que L’Île au trésor. Il reprend tous les éléments qui ont fait les beaux jours du genre : les Caraïbes, les grands voiliers, la chasse au trésor, au pouvoir… Jean Dufaux semble s’amuser comme un fou à réintégrer dans son récit toutes les composantes des romans d’aventures exotiques tels qu’ils fleurissaient à la fin du XIXe siècle, reprenant quelques-unes des péripéties, comme dans cet album, où il fait revivre les anthropophages.
Jérémy, qui fut l’assistant de Philippe Delaby, offre un graphisme en harmonie avec l’imagerie traditionnelle du genre, avec les idées que l’on peut se faire des acteurs de cette tragédie, dans le décor idéalisé de telles actions. Avec un dessin dynamique, proche d’une réalité fantasmée, il ne s’économise pas et donne des vignettes complètes, détaillées d’une grande efficacité dans les actions et d’une grande qualité. Sa variation des cadrages colle parfaitement au rythme du scénario.
Avec Cannibales, Jean Dufaux donne pleine puissance à son art narratif, un art magnifiquement relayé par un graphisme attractif.
Découvrir l’album : http://www.dargaud.com/bd-en-ligne/barracuda-tome-5,7905-891214627cff8d86292bb8e2457f064d
serge perraud
Jean Dufaux (scénario), Jérémy (dessin et couleur), Barracuda, t. 5 “Cannibales”, Dargaud, juin 2015, 56 p. – 13,99 €.