Yves Ravey, Sans état d’âme — Rentrée 2015

Yves Ravey et les disparitions

Yves Ravey une fois de plus sera sans doute ignoré par les grands prix lit­té­raires. Il n’en demeure pas moins un des rares roman­ciers signi­fiants dans la lit­té­ra­ture fran­co­phone de ce début de mil­lé­naire. Certes, l’argument de sa fic­tion tient — comme tou­jours — à peu de chose : un jour (ou plu­tôt une nuit), John Lloyd s’évapore sans lais­ser le moindre indice. Son amie, va char­ger Gus­tave Leroy de mener l’enquête. Mais qu’importe l’histoire. L’auteur s’intègre par­fai­te­ment dans le pay­sage qu’au fil du temps les dif­fé­rentes « écoles » (si écoles il y a ou eu ) que les Edi­tions de Minuit ont illus­trées,  de Robert Pin­get à Jean-Philippre Tous­saint.L’écriture retient, plus que le récit « main-street », les à-côtés. Ils font que la fic­tion existe et reste digne de son nom. Sans eux, le roma­nesque ne décline que des faux che­mins. Mais la sélec­tion par le roman­cier de ce qui bous­cule l’apparente logique fic­tion­nelle et fomente le peu de confor­mité à ce que l’on serait en « droit » d’attendre d’elle, demande autant une atten­tion sou­te­nue qu’un cer­tain laisser-aller. Cela per­met au roman de battre sa cam­pagne en ména­geant des pauses lorsque l’histoire en elle-même pour­rait « fatiguer ».

Ravey sait en chaque situa­tion sou­li­gner le ridi­cule comme le tra­gique mais sans jamais insis­ter. Il reste autant élu­sif que pos­sible. Et si par­fois on exi­ge­rait de lui plus de détails, il coupe court en répon­dant en fili­grane qu’on verra bien. C’est ainsi qu’au fur et à mesure le roman s’étoffe tout en se défai­sant ; le lec­teur y voit plus clair  - du moins en appa­rence — dans un som­meil neuf de cer­tains voyages et dans les ardeurs de vaga­bonds qui fran­chissent autant de seuils qu’ils s’arrêtent dans des lieux d’ombre, là où tout devient mou­vant, fuyant, insai­sis­sable dans la part d’arbitraire que recèle l’école du regard façon Ravey.

Lire les pre­mières pages

jean-paul gavard-perret

Yves Ravey, Sans état d’âme, Edi­tions de Minuit, 2015, 128 p. — 12,50 €.

1 Comment

Filed under Romans

One Response to Yves Ravey, Sans état d’âme — Rentrée 2015

  1. Villeneuve

    Le roman d’Yves Ravey est digne des Edi­tions de Minuit sans his­toires et bien écrit . JPGP a tout compris .

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