Sanda Voica, Epopopoèmémés

Fugues de Sanda Voïca

Sandra Voïca ose enfin par­ler et écrire, écrire et par­ler après un long temps d’abstinence ou de matu­ra­tion. Certes, elle va encore à pattes de velours : d’où le titre « Epo­po­poè­mé­més ». Le terme frôle l’épopée mais la nuance très lar­ge­ment de macu­la­tions (« le popo ») déri­soires. Cela n’empêche pas cer­taines envo­lées mys­tiques de celle qui « entend des voix » et à même voulu « pho­to­gra­phier Jésus ».
La poé­tesse cultive les chan­ge­ments de tons et de bra­quets. Sous forme de faux jour­nal — en sa seg­men­ta­tion ‚- elle pro­pose un strip-tease de l’âme. Celle qui se dit « mol­lasse mais jamais lasse. Moi en plus com­plète — pas encore Dieu, mais une petite Déesse » garde beau­coup d’esprit, de spi­ri­tua­lité mais tout autant une « cuisse blon­dasse encore dési­rante d’y faire entrer mon homme ». Nous voilà ras­su­rés et ravis de suivre les péri­pé­ties de la poé­tesse et de son Sam (l’autre Sam, même si Beckett est tou­jours là avec Jouf­froy et d’autres poètes).

Toujours lou­foque (ce qui est une poli­tesse rare chez les poètes et encore plus chez les poé­tesses), Sanda Voïca crée par ses poèmes sa famille de cœur et d’esprit A l’exubérance iro­nique (et rou­maine ?) fait place par­fois une radi­ca­lité afin d’inventer une autre rela­tion aux proches entre réa­lité et fic­tion déjà pré­sents dans toute construc­tion de la mémoire. Sur­git une face cachée de la poé­tesse mais aussi du monde tra­versé (entre autres) par Oscar Peter­son, Chris Mar­ker, Ste­vie Won­der mais aussi « le tuli­pier de Vir­gi­nie », amie tendre et incon­nue.
Sans sou­mis­sion au roman­tisme du passé, la créa­trice ne se débar­rasse jamais de la part la plus incon­nue et résis­tante du réel comme d’elle-même. Renouant avec le figu­ra­tif comme avec une sorte de « land-art » poé­tique, la catho­lique et Rou­maine incarne une écri­ture qui se joue des appa­rences et cherche à per­cer ce qui paraît évident. En extra­yant non la proxi­mité du loin­tain mais le loin­tain de la proxi­mité et en déga­geant tout ce qui n’est que de l’ordre du spec­tacle et de l’évènement, Sanda Voïca « toxique et mor­telle » caresse avec iro­nie et humour l’ambition de deve­nir ainsi « immor­telle ». C’est tout le mal qu’on lui souhaite.

jean-paul gavard-perret

Sanda Voica, Epo­po­poè­mé­més, Edi­tions Impec­cables, 2015, 134 p.

3 Comments

Filed under Poésie

3 Responses to Sanda Voica, Epopopoèmémés

  1. Le Dantec Denise

    Mer­veilleux et juste com­men­taire si j’en crois … Et vive Sanda Voïca + Sam !

    • sanda voïca

      Merci, chère Denise Le Dan­tec ! Et oui, il faut en croire : Jean-Paul Gavard-Perret a bien “saisi” mon livre !

      Sanda Voïca

    • sanda voïca

      Voir d’ailleurs aussi son autre note de lec­ture : très-très juste aussi et si péné­trante — sur le site du Salon lit­té­raire; lien ici : http://salon-litteraire.com/fr/sanda-voica/review/1936304-sanda-voica-fretillante-truiste

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