Alex Alice & Thimothée Montaigne, Le troisième Testament : “Julius IV

Un cycle d’exception !

L’action se situe trente ans après la mort du Christ. Julius Publius Vin­dex, géné­ral ambi­tieux déchu, a été condamné à l’esclavage dans les mines de soufre. Là, il fait la connais­sance d’un com­pa­gnon de souf­france juif consi­déré comme le Mes­sie. Libéré par les rebelles zélotes, ce der­nier est per­suadé par un Sage qu’il est le frère du Christ et qu’il doit révé­ler au monde le Troi­sième Tes­ta­ment qui ouvrira les portes du Royaume des Cieux. Julius, six autres élus et celui qu’on appelle main­te­nant Sar Ha Sarim, partent vers l’Orient pour trou­ver la nou­velle parole divine. La route est longue et dif­fi­cile. Seuls Julius et le Sar arrivent près du terme. Tombé dans une cre­vasse, Julius est sauvé par son com­pa­gnon qui aban­donne alors la quête de ce fameux tes­ta­ment et retourne en Judée pour fédé­rer les rebelles et libé­rer son peuple.
Julius, ayant retrouvé des forces, est retourné dans la mon­tagne avec un rou­leau vierge et de l’encre. Après avoir fran­chi un col, épuisé, il s’effondre. Quand il reprend ses esprits, près de lui, le rou­leau n’est plus vierge, cou­vert d’une écri­ture qu’il ne sait pas lire. Il le ferme de sept sceaux, réser­vant la décou­verte du contenu à Sar Ha Sarim. Celui-ci mène la guerre contre l’occupant romain. Il doit faire face à un redou­table adver­saire en la per­sonne du légat Ces­tius. Mais ce sau­veur tant attendu obéit-il aux ordres de Dieu ou est-il poussé par des pas­sions plus humaines ? Que contient ce rou­leau que Julius rap­porte et dont il veut réser­ver la pri­meur au frère du Christ ?

Pour­quoi ne pas ima­gi­ner un Troi­sième Tes­ta­ment car la parole de Dieu est si mul­tiple ? L’Église catho­lique, par exemple, a fait le choix de ne conser­ver que quatre Évan­giles. Les textes écar­tés sont-ils, pour autant, d’une ins­pi­ra­tion moins divine ? Avec cette série, Alex Alice signe un récit épique met­tant en scène tous les ingré­dients d’une véri­table épo­pée ou se mêlent la foi, la folie, la guerre, le doute, le besoin en croyances et, para­doxa­le­ment, le besoin de vivre libre. Il pose des inter­ro­ga­tions sur l’authenticité des mis­sions dont cer­tains se croient inves­tis. Les déci­sions prises par les hommes sont-elles dic­tées, les choix que cha­cun opère sont-ils le fruit de leur seule volonté ? Y-a-t-il une puis­sance qui assiste et qui guide des indi­vi­dus plus que d’autres, ou est-ce seule­ment le fruit de leurs pas­sions, de leur ambi­tion ? Se laissent-ils por­ter par des évé­ne­ments incon­trô­lables, incon­trô­lés, un des­tin qui se forge ? Sont-ils réel­le­ment les mes­sa­gers d’une mis­sion divine ou n’est-ce qu’une ambi­tion déme­su­rée habillée pour mieux empor­ter l’adhésion ?
Mais toutes ces ques­tions méta­phy­siques sou­le­vées n’excluent pas une intrigue ponc­tuée de nom­breuses scènes d’actions au sein d’un récit en ten­sion. Le scé­na­riste pose aussi des ques­tions rela­tives à la fina­lité des com­bats, de la guerre, au sang versé, aux rap­ports ambi­gus que peut entre­te­nir un mes­sie et ses apôtres, entre la foi qui les anime et les liens d’admiration et de dévotion.

Thimo­thée Mon­taigne exé­cute un des­sin d’un réa­lisme sai­sis­sant, aux traits abrupts, aux noirs-obscurs forts dans une mise en scène superbe. Il mul­tiple des scènes gran­dioses avec une pers­pec­tive attrac­tive et des foules de per­son­nages. Son trait inci­sif campe des per­son­nages bien trem­pés, fait res­sen­tir le dyna­misme des scènes de lutte et une dimen­sion spi­ri­tuelle forte dans les scènes d’échanges et de dia­logues. Le Troi­sième Tes­ta­ment, et en par­ti­cu­lier ce cycle autour de Julius de Sama­rie, un pro­phète oublié, est une totale réus­site tant au point de vue scé­na­ris­tique que graphique.

Voir les 1ères planches

serge per­raud

Alex Alice (scé­na­rio, story-board, cou­ver­ture), Xavier Dori­son (concept ori­gi­nal), Thi­mo­thée Mon­taigne (des­sins), Fran­çois Lapierre (cou­leurs), Le Troi­sième Tes­ta­ment, Julius livre IV, Glé­nat, coll. Gra­fica, avril 2015, 64 p. – 14,95 €.

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