Faire régner la justice n’est pas sans dangers !
Après Elfes, les Éditions Soleil proposent, avec Les Maîtres inquisiteurs, une nouvelle série d’Heroic fantasy en six albums. Chaque album déroule une enquête menée par un duo de protagonistes composé d’un inquisiteur et d’un Elfe. Le dernier épisode réunira les dix enquêteurs pour démasquer l’ennemi commun à tous.
Pour l’heure, ce premier tome met en scène Obeyron et définit le cadre où se situe l’action de la série. Une guerre de mille ans, appelée le Chaos, a ravagé les terres d’Oscitan. La paix revenue, les dirigeants veulent faire régner la justice, une notion bien maltraitée pendant les combats. Pour cela, les mages créent la caste des Maîtres inquisiteurs. Obeyron est envoyé dans la Forêt des Soupirs, pour un demi-siècle, afin d’implanter ces nouvelles lois dans un clan de sauvageons, sur un territoire peuplé de dragons.
Quarante ans plus tard, il réapparaît à Ares, la cité des Maîtres inquisiteurs, alors que tout le monde le croyait mort. Il revient exiger justice et venger la mort d’I’Javen, l’elfe qui l’accompagnait. Pour commencer, il s’attaque à Hen’Gonar, devenu commandant de l’armée d’Ares, avec qui il avait eu maille à partir quelques décennies auparavant. Il veut savoir pourquoi on l’a envoyé aux Soupirs dans une mission suicide et qui voulait sa peau. Hen’Gonar énumère alors tous ceux qu’Obeyron a mutilés, humiliés, vaincus parmi les soldats, les dirigeants, les truands. De fait, il avait une foule d’ennemis et n’était soutenu que par un seul juge…
Ce premier volet présente un personnage au caractère contrasté, un individu façonné par la guerre et qui en garde des séquelles comme le goût de la violence et du combat. Cependant, ancien mage, il veut une société plus juste, plus pure où règne la justice. Les souffrances endurées pendant la guerre lui laissent penser que du chaos doit naître, émerger un monde plus harmonieux. Mais cette intransigeance dérange. Tombé dans un piège, il est confronté à une situation relativement inédite, permise par le jeu de la fiction, de l’héroic fantasy et de la magie qui l’habite : se mettre en chasse de son assassin.
À partir de l’univers crée par Jean-Luc Istin, Olivier Peru développe une histoire intense peuplée de personnages tous aussi intéressants les uns que les autres. Il alterne, avec équilibre, les actions du présent et les flashbacks qui éclairent utilement le déroulement de l’intrigue, les motivations, les raisons qui poussent les héros.
Sur les pas d’un personnage torturé, à la limite de la folie, le scénariste propose une intrigue passionnante à suivre. En effet, qu’a fait Obeyron entre le début de sa mission et sa réapparition tonitruante ? Il remet en cause des équilibres, des situations arrangées, des arrangements entre amis. Le dessin de Pierre-Denis Goux, tant sur les décors que sur la typologie des personnages, est précis, fouillé et créatif. Il propose un travail graphique remarquable, souligné par une mise en pages à la fois classique et ouverte, soutenue par une mise en couleurs fort réussie de Digikore Studios.
Obeyron est un premier album qui fait attendre le suivant (Sasmaël) avec intérêt en espérant y trouver le même plaisir de lecture.
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serge perraud
Olivier Peru (scénario), Pierre-Denis Goux (dessin), Digikore Studios (couleurs), Les Maîtres Inquisiteurs, t.1 : “Obeyron”, Soleil, coll. “Heroic fantasy”, mars 2015, 56 p. – 14,95 €.