Les relations de bon voisinage ne sont plus ce qu’elles étaient
Nora vient d’emménager dans sa nouvelle maison avec sa fille, adolescente pleine de vie. En instance de divorce, elle commence une nouvelle vie et sympathise très vite avec sa voisine Typhaine, qui vit dans la maison jumelée de l’autre côté de la haie. Nora ne sait rien du passé tumultueux de cette dernière et est ravie de découvrir qu’elle a un fils du même âge que sa fille. Très vite cependant, son ex-mari perturbé, un rien inquiet pour le bien-être des siens, va mener son enquête et lui apprendre que les anciens locataires de la maison où elle s’est installée s’y sont suicidés. Typhaine de son côté semble assez perturbée, et ses relations avec son mari sont particulièrement agitées. Leur fils adoptif est quant à lui de plus en plus renfermé, même si une idylle se noue avec sa nouvelle voisine.
Quand l’ex-mari de Nora disparaît subitement, Nora, est loin de se douter que sa vie va sombrer dans le chaos, un chaos orchestré par Typhaine, qui cache sous ses sourires angéliques des plans diaboliques.
Si vous êtes adeptes de “la fête des voisins”, alors ce livre n’est pas pour vous ! Il pourrait vous donner des sueurs froides et surtout vous pousser à vous demander qui se cache en réalité derrière les sourires aimables de votre voisine préférée ou la poignée ferme de son époux. Barbara Abel nous apporte une suite réussie de son roman Derrière la haine, dont les personnages nous avaient déjà glacé le sang. On retrouve la machiavélique Typhaine, son mari Sylvain plus ou moins soumis, et leur fils adoptif Milo, un rien perturbé depuis la disparition tragique de ses parents, qui n’étaient autre que les meilleurs amis du couple.
L’auteure campe des personnages crédibles que l’on pourrait croiser au quotidien et avec qui on pourrait entamer une conversation derrière la haie de notre jardin, sans se douter un rien du monde des secrets qu’ils cachent. Barbara Abel nous révèle la folie qui peut sournoisement s’installer sous la plus belle des apparences. Elle le réussit d’autant mieux que les situations sont mises en scène dans ces petits pavillons de nos banlieues où la vie paraît idyllique, mais qui peut basculer dans l’horreur et le fait divers une fois que les volets sont clos. Un apéritif entre amis se déroule ici dans une atmosphère pesante, lourde de sous-entendus. Un service rendu, comme aller chercher les enfants de la voisine, prend très vite des conséquences incroyables. Une banale dispute avec son ex ou son époux, et la vie devient un enfer. Ne dit-on pas que ce dernier est justement pavé de bonnes intentions ? Comme celle de nouer de nouveaux liens et espérer retrouver dans une amitié naissante un écho à ses problèmes, et une écoute attentive.
Nora n’est pas aussi innocente et naïve que pourraient le laisser supposer les premières pages du roman ; Typhaine, quant à elle, est encore plus perturbée que dans le premier opus ; nevrosée, psychopathe, elle a tout pour nous inquiéter et elle ne réussit pas mieux dans son rôle de mère adoptive que dans celui d’épouse envahissante. Elle ne cesse de surveiller Milo, en pleine crise d’adolescence et d’identité. Vous l’avez compris, la psychologie fouillée des personnages fait la grande réussite de cette suite, des personnages en proie au doute quant à leurs choix de vie, désespérés dès que leurs secrets risquent d’être dévoilés au grand jour, et prêts à tout pour ne pas voir leur vie sombrer un peu plus.
Peut-être l’auteure était-elle fan de la série Desperate housewives, car on y retrouve un peu de cette folie qui régnait dans les relations de voisinage, l’humour en moins. Car ici, tout tourne rapidement à la tragédie. En tout cas la littérature belge a de beaux jours devant elle avec Barbara Abel. Le rythme est rapide, et jamais l’ennui ne s’installe, même pour ceux qui ont lu Derrière la haine. Le final, où l’on attend avec impatience une confrontation entre les deux héroïnes, réserve encore quelques surprises …mais la romancière doit néanmoins faire attention à ne pas être tentée par l’écriture d’un troisième volet, qui pourrait cette fois-ci nous gâcher le plaisir.
franck boussard
Barbara Abel, Après la fin, Pocket, 2015, 359 p. — 8,90 €.c, Pocket, 2015, 359 p. — 8,90 €.