Un tome d’introduction pour un nouveau cycle qui témoigne d’une maturité certaine chez un auteur bien connu des amateurs de Fantasy anglaise
Le village de Trois-Ruisseaux est prospère : ses habitants connaissent la paix depuis longtemps. Ils n’oublient pas pour autant de remercier les dieux et les esprits de la nature régulièrement. Varaconn et Meria voient leur premier fils Connavar naître lors d’un violent orage. Ils sont tout à leur bonheur quand Vorna, la magicienne accoucheuse, annonce quelle sera la geasa — la destinée — de l’enfant. Ce même jour, Varaconn brise la sienne et meurt dans les affrontements qui opposent son clan à un autre. Meria, endeuillée et inconsolable, élève Connavar et finit par épouser Ruathain, le meilleur ami de Varaconn. Ce dernier veille sur Connavar, qui est un enfant turbulent mais apprécié de tous. Un jour, pour sauver un de ses amis, il va jusqu’à affronter un ours, en étant juste armé d’un couteau. C’est le début d’un destin exceptionnel.
Aidé par les esprits de la nature, qui lui offrent une épée magique, Connavar met en œuvre tout son génie militaire pour atteindre le but qu’il s’est fixé : protéger son peuple. Et les évènements s’accélèrent. Sa renommée grandit encore et encore. Bientôt, seul son surnom de Démone-Lame suffit à effrayer ses ennemis. Mais ceci sera-t-il suffisant pour résister, alors que les nations bordant les terres de la tribu des Rigantes s’affrontent et menacent de tout détruire ? Connavar saura-t-il guider son peuple et vaincre les trois armées qui le défient ?
David Gemmell est un nom bien connu des amateurs de Fantasy anglaise. Son premier roman Légende a été récompensé par le prix Tour Eiffel 2002 et a reçu un accueil enthousiaste de la part du public. Il faut dire que l’homme a une sacrée maîtrise de la plume et, comme ses héros, il n’hésite pas à taper fort. Son style est simple, dépouillé même, ses histoires sont prenantes et réunissent un lectorat varié. Certains de ses fans avouent même avoir été réconciliés avec la lecture grâce à ses œuvres, c’est dire !
Avec ce premier tome du cycle des Rigantes, David Gemmell ne déçoit pas. Si ce récit est tout aussi musclé que les précédents, il se montre beaucoup plus attaché à la psychologie des personnages. Il n’y a certes pas de grandes descriptions des tourments intérieurs mais des allusions subtiles et une peinture par petites touches d’un univers complexe et des doutes qui tiraillent le héros. Car cette fois, tout n’est pas blanc ou noir ; la guerre est laide, qu’elle soit vue de l’un ou l’autre camp. L’on notera aussi que la magie est ici à l’œuvre sous un jour très nuancé ; le roman prend ainsi ses distances par rapport aux ambiances à la Conan Le Barbare, où la magie est négative.
C’est d’ailleurs le terme de tempérance qui prévaut pour qualifier ce roman. L’auteur a parcouru beaucoup de chemin depuis ses premiers écrits et on sent qu’il réussit là à atteindre un point d’équilibre qui devrait satisfaire les aficionados de la première heure tout en séduisant de nouveaux lecteurs. Une progression d’autant plus intéressante que les thèmes de prédilection demeurent identiques. Il faut aussi saluer les efforts consentis par David Gemmell pour exposer les enjeux politiques, mariant ainsi dans ce récit, avec une remarquable habileté, les exigences d’un public aimant le combat et la simplicité à celles de lecteurs goûtant davantage la subtilité des rapports diplomatiques. Ce n’était pas chose facile. Pourtant, l’équilibre est atteint. Ce tome d’introduction montre une certaine maturité ; les personnages sont moins tranchés mais leur caractère est plus dense, et la marque de fabrique “David Gemmell”, gage de qualité, est néanmoins conservée.
Le plaisir de lire est là, les pages se tournent rapidement et on attend de pied ferme la suite des aventures de Connavar.
anabel delage
David Gemmell, Rigante — Tome 1 : “L’épée de l’orage” (traduit par Alain Névant), Bragelonne, 2004, 378 p. — 22,00 €. |
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