Mirka Lugosi, libertine masquée
Il existe dans les Figures de Mirka Lugosi d’étranges religieuses athées aux pensées et fantasmes translucides qui s’égrènent dans la chaleur du tourment et l’immobilité du supplice en négatif. S’y entendent des messes basses de petit matin de stupre où personne ne souffre du péché de la chair. Bien au contraire. Du corps, de telles figures en font leur quatre heures, leurs cinq à sept, leurs vêpres sans que jamais ne soir prononcé le moindre « ite missa est ».
Mirka Lugosi aime s’amuser avec les fétiches et les leurres. Le corps féminin est fièrement dressé, exhaussé. Il affiche parfois en prothèse un immense phallus ou ce qui en tient lieu pour l’ovaire des roses et le rosaire des impies. Un rien gothique par effet de blanc et de noir surgit l’inversement des images. Elles deviennent des sortes de fantômes et des lamproies avec ça et là un gonflement d’écume sous d’interminables voiles. Dans la crypte féminine (la plus belle des églises), tels des cierges, les phallus s’allument pour que l’office se passe dans les vallées de l’onirisme. Qui rappelle à l’artiste sa contrée de naissance qu’hanta Dracula.
La créatrice n’exhibe néanmoins ses secrets de vampire que par déboîtement de désirs là où la louve est menaçante et où les muses deviennent des Saintes dont la trique mystique fait avancer l’âne ou le porc. Avec Mirka Lugosi, seule la femme est épique. Angélique ou harnachée de cuir, la femme semble connaître tous des stupres et de la fornication. Mais plus question à l’artiste d’apprendre le morse aux ogres. Il faut qu’ils se débrouillent tout seuls (voire à leur main) avec ce que les œuvres de l’artiste leur accordent.
jean-paul gavard-perret
Mirka Lugosi, Figures, C.R.A.C. de Sète, 6 février – 3 mai 2015.