De toupet Paul n’en manque pas
D’innocentes lapines semblant égarées sur la route du temps. Leur corps entier tente de se dégager de sa coque. Elle est devenue pourtant sa complice si bien que le corps peut y suffoquer en douceur mais il exige une autre histoire avec une autre fin que celle d’une peau de lapin. Il faut donc regarder des figurations pour guérir dans la densité de leur silence sans fond. Il faut accepter ces visiteurs étranges, ces « animaux » christiques. Les blessures du passé ne demandent qu’à s’asseoir près d’eux dans un besoin mélancolique de partager le chagrin du temps et de trouver dans leurs masques des reliques la vie cachée.
Comment ne pas être touché ? Les corps sont là pour montrer à ceux qui restent le peu que nous sommes. Lapins, lapines restent emmitouflés. Ils sont pourtant des coups de poing. Personne pour les prendre sur des genoux. Ces hybrides, son,t-ce vraiment eux ? Est-ce vraiment nous ? Tous demandent confusément pardon mais de quoi sinon des cicatrices faites par les autres à leur terre ? Peut-être devrions-nous compter les journées de joie sur leurs oreilles. Dans leur silence ils hurlent ce qu’on ne veut entendre.
Leurs larmes restent invisibles. Dans le formidable cortège humain, ils font taches. Ce sont des momies vivantes qui sont là. En bonnes camarades, elles font de nous leurs égarés provisoires. Notre foule est de plus en plus compacte. Finalement, il n’existe que la légèreté d’âme comme critère. Il n’existe pas d’autre jour que celui où leur présence se dilue dans le tout. Voilà l’issue avant que le gris-noir ne s’étende, avant la nuit totale. Il faut la brutalité de telles images.
Le blasphème jouxte l’adoration, la lumière les ténèbres en une anarchie iconoclaste.
jean-paul gavard-perret
Paul Toupet, Le Terrier, Atelier Paul Toupet, Paris, 2014.