De l’Empire romain, la Grande Histoire a retenu le goût des citoyens pour les jeux du cirque, particulièrement les combats des gladiateurs. Cependant, les courses de chars constituaient alors un des divertissements majeurs de la Rome antique. Les conducteurs de quadrige sont des héros adulés du public. Sur leurs victoires, des parieurs risquent des fortunes. La série Gloria Victis place son action au cœur de ce divertissement, dévoilant les coulisses de celui-ci.
En l’an 156 de notre ère, Dioclès le plus célèbre des auriges, est dans une province en Espagne. Il fonde beaucoup d’espoirs sur son élève, Hermeros, pour lui succéder. Parmi les quatre concurrents qui s’alignent ce jour-là, Victor use de traîtrise et provoque un grave accident. Aelio, depuis les tribunes, assiste à la mort de son père. Il se promet de ne jamais être un aurige. Douze ans plus tard, alors qu’il est esclave à Valeria, il sauve de la mort Horacia et Fabia sa servante. Cette matrone, ô combien acariâtre !, est l’épouse de Caius Gratius Nigunis, un amateur de courses et de chevaux. Aelio, en guise de récompense pour son geste courageux, demande la grâce de Fabia, responsable, selon sa maîtresse, de sa mise en danger et promise à un terrible châtiment. Caius, qui connaissait Hermeros, perçoit chez le fils son amour pour les chevaux, les capacités du jeune homme à les dresser et s’en faire obéir. Il le prend sous son aile, l’affranchit et en fait son palefrenier espérant qu’il devienne rapidement un aurige. La matrone, percevant les tendres sentiments qui se nouent entre Fabia et Aelio, décide d’empêcher leur union et de détruire leur bonheur. Le fils du conducteur responsable de la mort d’Hermeros a pris la suite de son père. Il est ambitieux et avide de gloire, et comme lui, est prêt à user des moyens les plus abjects pour gagner…
Juanra Fernandez est d’abord un cinéaste. Il a signé plusieurs courts-métrages, un long métrage (Pour Élise) et en termine un second. Il a, par ailleurs, fait paraître trois romans et obtenu, dans son pays, le Prix National du Roman historique. Aussi, il ne faut pas s’étonner que son scénario aboutisse à une présentation très visuelle. C’est lors d’une visite au musée de Cuenca, devant la stèle funéraire d’un aurige, que l’auteur a eu l’idée de ressusciter ce personnage, célèbre en son temps, et oublié par l’Histoire. D’où le titre quelque peu ironique de la série. Il lui, permet, également, de décrire la civilisation romaine en l’observant par le “petit bout de la lorgnette”.
Pour son héros, un jeune homme qui, bien que hanté par la mort de son père, possède une passion pour les chevaux, il ne se contente pas d’une situation dichotomique centrée sur un seul dilemme. Il met en place les éléments d’intrigues multiples qui doivent se montrer passionnantes dans les trois prochains tomes.
Le dessin de Matteo Guerrero fait merveille pour mettre en images cette histoire conçue pour être très visuelle. Il réalise des planches superbes. Ses vues des arènes, des courses de chars, des chevaux sont parfaitement réussies. Il construit une galerie de personnages auxquels il donne une mobilité des traits, une expressivité très forte.
Les Fils d’Apollon se révèle un premier tome convaincant tant par son intrigue que par son graphisme, la promesse d’une série attractive et remarquable.
serge perraud
Juanra Fernandez (scénario), Mateo Guerrero (dessin), Javi Montes (couleurs), Gloria Victis, tome 1 : “Les Fils d’Apollon”, Le Lombard, octobre 2014, 56 p. — 13,99 €.