Yves Chiron, Benoît XV. Le pape de la paix

Le pape de 1914

Benoît XV demeure un des papes les moins bien connus du XXe siècle, celui dont le pon­ti­fi­cat cor­res­pond à la période de la Grande Guerre. C’est à la fois juste et réduc­teur. D’une part parce que son règne déborde sur l’après-guerre, et d’autre part parce qu’on ne peut limi­ter le règne d’un pape aux ques­tions diplo­ma­tiques, aussi pri­mor­diales soient-elles. C’est la rai­son pour laquelle une bio­gra­phie de Benoît XV per­met de mieux éclai­rer la cohé­rence du per­son­nage, l’ensemble de sa pen­sée et de ses actions. Celle écrite par Yves Chi­ron, avec la clarté qu’on lui connaît, lève le voile sur ces ques­tions impor­tantes.
Diplo­mate, Benoît XV l’est de for­ma­tion. Issu de l’aristocratie génoise, il fait car­rière au sein des ser­vices de la Curie, dans l’ombre du car­di­nal Ram­polla. Son expé­rience épis­co­pale, au siège de Bologne, n’en est pas moins mar­quante. Il s’inquiète de la mau­vaise qua­lité du caté­chisme dans son dio­cèse, des insuf­fi­sances du clergé (les choses, on le voit, n’ont guère changé…) et adopte une atti­tude modé­rée dans la que­relle qui à l’époque oppose les moder­nistes aux conser­va­teurs.
Ces élé­ments, on le com­prend à la lec­ture du livre, pèsent dans le choix du Sacré Col­lège en août 1914, quand il faut élire un suc­ces­seur à Pie X. Ce fai­sant, Benoît XV œuvre en faveur de la paix, tout en pré­ser­vant la neu­tra­lité du Saint-Siège, non sans espé­rer lui redon­ner une influence diplo­ma­tique et résoudre l’empoisonnante ques­tion romaine. Rien ne réus­sira car le pape se heurte à une guerre tota­li­sante qui refuse les solu­tions négo­ciées. Il n’empêche que Benoît XV conso­lide par son action l’autorité morale de la papauté qui s’épanouira avec les pon­ti­fi­cats suivants.

Ce pape est aussi un mis­sion­naire, aux intui­tions pro­phé­tiques ; un défen­seur de la foi et du dogme, de la tra­di­tion, tout en étant favo­rables aux études scien­ti­fiques et à un cer­tain esprit d’ouverture. Ni pro­gres­siste ni inté­griste comme nous dirions aujourd’hui… Ce pon­ti­fi­cat, court et mal connu, cor­res­pond à la pre­mière confron­ta­tion de la papauté avec le XXe siècle, ses fureurs idéo­lo­giques, sa vio­lence, son inhu­ma­nité. Il pour­rait être jugé néga­ti­ve­ment au regard des maigres résul­tats de la diplo­ma­tie papale. Pour­tant, il pose des fon­de­ments qui ser­vi­ront à Pie XI et Pie XII dans leur com­bat pour l’homme et sa dignité, face à des maux bien pires encore…

 fre­de­ric le moal

 Yves Chi­ron, Benoît XV. Le pape de la paix, Per­rin, octobre 2014, 380 p. –22.90 €

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