En quelques heures, tout bascule !
La bataille a été, pendant longtemps, un aboutissement incontournable d’un conflit. Les vainqueurs, comme les vaincus, ont vu le cours de leur l’histoire se modifier en bien ou en mal… c’est selon. Arnaud Blin fait une approche novatrice de quelques-uns de ces moments décisifs.
Dans une introduction notablement étayée, l’auteur s’interroge sur la notion de bataille et ce que recouvre ce terme. Qu’est-ce qui définit une bataille par rapport à une guerre, à une campagne ? En général, une bataille est perçue comme un choc militaire violent plus ou moins bref. Puis, il dresse un état historique du récit de batailles, les modes qui ont régenté ce type d’événement. Celui-ci était aussi fonction de la qualité du rédacteur, qu’il soit historien, militaire ou stratège. En effet, les points de vue, les angles de traitement et d’approche diffèrent assez significativement.
L’historien qui se lance dans le récit d’une bataille doit disposer d’informations fiables et de sources abondantes. Or, pour des combats très anciens, avec des civilisations qui n’ont guère laissé de traces écrites, il n’est pas commode d’en faire des récits fidèles.
Parmi la cinquantaine de batailles qui ont changé le cours de l’histoire, Arnaud Blin en retient onze qu’il a choisies avec, reconnaît-il, une part de subjectivité. Il a voulu n’évoquer que les confrontations où l’incertitude sur l’issue était manifeste, offrir une palette chronologique allant de l’Antiquité au XXe siècle, ne se limitant pas au sol européen et inclure au moins un affrontement naval.
On peut citer Gaugamèles (331 avant J.-C.) où Alexandre écrase l’armée perse et fonde un éphémère empire. Aux Champs Catalauniques (451), Attila voit son irrésistible progression ruinée. À Hattîn (4 juillet 1187), Saladin signe la fin du Royaume franc de Jérusalem. Cortès affronte les Aztèques à Tenochtitlán (août 1521) et une civilisation s’effondre. La Bataille navale de Lépante (6 novembre 1632) permet à l’Occident de reprendre la suprématie maritime perdue depuis un millénaire. Borodina/ la Moskova (7 septembre 1812) est le premier grand revers de Napoléon comme Stalingrad (juillet 1942-février1943) est celui d’Hitler.
Pour chaque bataille, l’historien retrace le contexte politique, social ou religieux dans laquelle elle s’inscrit. Il dresse le portrait et une biographie synthétique des chefs en présence, puis décrit, cartes à l’appui, la stratégie et le déroulement des combats, convoquant les chroniqueurs aux relations les plus affutées, les témoignages les plus proches de la réalité, de la vérité. Puis, en conclusion, il dresse un tableau des bouleversements que cette bataille a engendrés.
Mais l’intérêt de ses récits réside dans une vision large de la bataille. Depuis que l’homme sait écrire, la description de combats a occupé une place importante. Les “grandes batailles” ont inspiré les historiens de toutes nationalités et de toutes les époques. Cependant, ceux-ci s’intéressaient essentiellement aux empereurs et autres généraux impliqués dans le conflit, sans vraiment prendre en compte la globalité de l’engagement. Arnaud Blin s’intéresse à la totalité des composantes, du chef au soldat de base, à la mise en œuvre des armes, au moral des troupes et, bien sûr, au contexte dans lequel s’inscrit le combat.
Prenant les meilleures sources, l’historien s’appuie sur une documentation solide pour offrir une vision totale des onze batailles qu’il a retenues. Un livre qui se lit comme un roman d’aventures.
serge perraud
Arnaud Blin, Les batailles qui ont changé l’histoire, Perrin, août 2014, 418 p. – 23,90 €.