Xu Xing, Et tout ce qui reste est pour toi

Il s’agit d’un vaga­bon­dage chi­nois entre les idées, les gens et les choses


Un vaga­bon­dage chinois

Il s’agit d’un vaga­bon­dage chi­nois entre les idées, les gens et les choses. D’un appar­te­ment trop petit dans une ville sur­peu­plée, de rues trop sales pour être décrites, de fous, et de la “civi­li­sa­tion spi­ri­tuelle socia­liste”. Tout ce dont on peut rêver pour être en rébel­lion. Car Xu Xing était bien, dès ces années-là (1980’s), un vivant tru­blion opposé à la plu­part des ins­ti­tu­tions de son pays, comme aux dogmes, reli­gieux et poli­tiques. Il est resté ce pen­seur libre et cet auteur ori­gi­nal qui appré­hende avec une acuité plus sen­sible que celle d’une arai­gnée, l’espace, le temps, la vie et le des­tin. La nar­ra­tion n’est pas vrai­ment linéaire, et ces his­toires se res­semblent par la dis­pa­rité des évè­ne­ments qui les peuplent.

La cohé­rence du récit pré­ci­sé­ment et le charme de l’ensemble vient de cette liberté de ton, de l’humour grin­çant des per­son­nages, en par­ti­cu­lier du nar­ra­teur, alter ego de l’écrivain (qui est aussi vidéaste). En indé­pen­dant farouche, celui-ci est tou­jours tenté par le voyage, une quête de nou­veauté, et d’inspiration, semble-t-il, bien chi­noise, puisque cette lit­té­ra­ture a tou­jours fait place aux errants de tous bords, ouverts à la bonne aven­ture des routes ini­tia­tiques. Mais comme l’avoue l’auteur, il a suf­fit aussi de lor­gner du côté de l’Occident pour goû­ter un peu de noma­disme ; il confirme : Don Quichotte ou Sur la Route ne laissent per­sonne indifférent.

Parce que le vaga­bond du roman Et tout ce qui reste est pour toi, l’habitant d’un vaste pays dont on aper­çoit l’évolution en cours de lec­ture, va jusqu’à ten­ter sa chance en Alle­magne (un autre bout du monde où Xu Xing a vécu quatre ans). L’écrivain voya­geur trop occupé à vivre l’insolite de nos contrées, découvre le monde et ses tra­vers comme un enfant ; il décrit ses désirs, sa peur du dan­ger dans un langue incon­nue, et l’attente. Elle est selon lui une sorte de récon­fort psy­cho­lo­gique, un moyen de maquiller sa peur de l’existence et son incapacité.

Il dit qu’il écrit peu, brouillonne même en fai­sant des petits bou­lots. Il cède à la ten­ta­tion, et à son désir d’une pute sublime, devant laquelle il ne res­sent que la sour­noi­se­rie du monde, une fois désha­billé et à l’horizontale. Tout ce que l’Ouest a à lui offrir n’est pas beau­coup mieux, en fait, que ce qu’il trou­vait chez lui. Un constat d’universalité de la mar­gi­na­lité sans doute mais aussi celui de trop de suf­fi­sance, de cupi­dité, por­tées par des per­son­nages secon­daires savou­reux. Par exemple, la vieille tante de l’ami chi­nois qu’il a rejoint, ne trou­vant rien de mieux que d’exploiter ses com­pa­triotes autant que ses clients, sert à ces der­niers, une soupe “mille saveurs” faite des restes de leurs plats de la semaine. Miam, miam… !

Lire notre entre­tien avec Xi Xung.

Lata Masud

   
 

Xu Xing, Et tout ce qui reste est pour toi (tra­duit par Syl­vie Gen­til), L’Olivier, 2003, 224 p. — 20,00 €.

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