Certains cauchemars ont du mal à passer la nuit. Chaque maison est délabrée et me tombe sur la tête. J’exclus l’ego, je suis condamné à faire l’œuvre qui me damne sans m’en détacher. Certes ça fait moins de souci, moins mal que la vérité sait le faire. Mais chaque jour je regrette ses visions à l’horizon d’absents qui reviennent sur scène dans le silence de leurs cortèges où se mêlent aussi de vieilles ivresses devenues sans joie et sans adoucir mes peines.
Ne trouvant plus les mots pour redire mes cauchemars baveux et affreux, ils jouent à cache-cache et réveillent de telles visions à la bonne fortune de la vie à la mort où rien n’est à jamais perdu tant que cela tourne encore par mon réveil. Avant, mon chat ronronne. Mais quand l’heure sonne pour de tels songes, il descend du lit au jardin en ondulant entre les fleurs en quête de chaleur.
Ma psyché absorbe mes idiomes étrangement familiers, nocturnes et réguliers à l’allure des heures où je reste passif mais espère de me promettre de les haïr pour laisser libre cours au vent de souffler la paix loin de mes dragons — qu’importe au fond de brandir une épée brisée. Que faire sans enfreindre la règle filmée par l’inconscient procréateur de peur ?
C’est se condamner à un tel ordinaire. Avancer dans le fantasme de la terreur n’a rien d’exceptionnel. Il ne faut pas s’en convaincre. On peut aisément y tomber le cœur ouvert aux autres cœurs.
jean-paul gavard-perret
photo : Nicolas Baghir