Dans une situation politique explosive…
En ce mardi 21 juin 1791, Nicolas Le Floch accompagne la reine Marie-Antoinette, vêtue modestement, jusqu’à une voiture. Parce qu’il est fidèle à ses engagements, il se retrouve mêlé à la fuite de la famille royale du palais des Tuileries. Il l’accompagne jusqu’au moment où le voyage s’achève, à Varennes, après que Drouet, le maître de poste de Sainte-Menehould, ait reconnu le roi.
Alors que toute la famille est sous bonne garde à l’étage d’une boutique, la reine apercevant Nicolas qui s’est glissé parmi la foule des curieux, lui fait un signe discret. S’approchant, elle lui demande de retrouver rapidement une lettre confidentielle qu’elle a laissée entre les mains de Monsieur de Rossignol, son chiffreur, et qu’il faut mettre en lieu sûr. Nicolas, atteint d’une rage de dents, repart dans la douleur pour Paris. Au palais des Tuileries, il découvre, dans son cabinet, le chiffreur assassiné, le local saccagé. Les courriers récents ont disparu.
Dans un Paris en ébullition où tous les partis se radicalisent, mener une enquête confidentielle…
Laurent Joffrin détaille, avec précision et avec brio, par le regard de son héros, la succession des faits qui ont amené le Roi à être reconnu, arrêté et renvoyé à Paris. Il fait état des opinions, des positions des différentes factions, mettant en scène des individus qui ont compté pendant quelques temps mais que la grande Histoire a un peu oublié. C’est ainsi que le romancier invite son lecteur à retrouver des individus tels que Jean Sylvain Bailly, maire de Paris, Pierre Choderlos de Laclos dans un rôle de journaliste influent et non pas comme le romancier épistolaire des Liaisons dangereuses. Il intègre Les Chevaliers de la foi, une société secrète authentique mais qui ne fut créé qu’en 1810.
Il explicite quelques méthodes de codage en vigueur telles que la stéganographie, méthode assez amusante, le système de Vigenère, le rectangle de Bellaso… Il raconte la façon dont les soins dentaires étaient appliqués et on peut se féliciter des progrès accomplis dans ce domaine. Il donne une belle place à la gastronomie, en particulier lors des rencontres du héros avec Aimé de Noblecourt qui se livre à des analyses politiques précieuses.
Quant au secret, il serait dommage de le dévoiler maintenant. Il faut retenir cette phrase magnifique : “On prêtait l’intention du crime aux autres pour justifier le sien.”, une pratique développée depuis la nuit des temps, certes, mais tellement d’actualité en ce moment.
Nicolas, marquis de Ranreuil, en héros vieillissant, n’approche-t-il pas de la cinquantaine ?, va devoir payer de sa personne. Et le romancier, s’il lui accorde quelques moments de douceur tant gastronomiques que dans des bras accueillants, va l’impliquer dans de dangereuses actions. Il se confronte à des de complots, des traîtrises dans une suite d’intrigues superbement tissées.
Ce nouveau volet des enquêtes de Nicolas Le Floch, commissaire au Châtelet, éclaire de belle manière des événements dont les conséquences ont été considérables. Les intrigues sont servies avec un fameux art du récit.
serge perraud
Laurent Joffrin, Les enquêtes de Nicolas Le Floch — Le Secret de Marie-Antoinette, Éditions 10/18, coll. “Polar”, octobre 2024, 312 p. — 8,90 €.