Proche de la pornographie (mais modifiée et caviardée), Say So rassemble les récents autoportraits de l’artiste américaine Whitney Hubbs, qui ont été pris dans le style de pin-ups bon marché et obscènes. Après son livre célèbre Woman in Motion dans lequel elle photographiait des modèles, cet opus poursuit sa quête pour explorer et remettre en question la relation entre l’appareil photo et le corps féminin. Dans ce livre, elle utilise et abuse de son propre corps avec un effet révélateur dans des performances masochistes (BDSM) qui se situent à l’intersection de l’érotisme et de l’humiliation et qui sont merveilleusement inconfortables à digérer.
Whitney Hubbs révèle donc une vision vraiment originale. C’est sombre et drôle, inconfortable et courageux, et la joie qu’elle prend à le faire est palpable. En utilisant l’appareil photo comme un public et un miroir, inscrivant dans une longue tradition d’artistes utilisant l’autoportrait photographique (Claude Cahun, Valie Export part exemple), elle retravaille son langage avec un formalisme dépouillé et tapageur proche de son passé de Riot Girl.
Certes, l’artiste écrit : « Je ne sais pas si c’est moi ou la photographie, mais je me retrouve ennuyée par beaucoup de travail ces derniers temps. Peut-être que c’est les deux ? Mais je ne m’ennuie pas avec mon travail », d’autant qu’il est plein de contradictions, et dans tous les sens du terme. Mais son livre (imprégné d’humour noir d’encre) répond à la précarité, à la solitude et à la marginalisation dans un monde qui est en plein déséquilibre.
jean-paul gavard-perret
Whitney Hubbs, Say So, Mack, Londres, 2024, 64 p. — 55,00 €.