Sarah Kofman, Rue Ordener, rue Labat

Une réédi­tion aug­men­tée dont l’intérêt ne convainc pas

Les édi­tions Ver­dier pro­posent une réédi­tion aug­men­tée d’un ouvrage paru en 1994 : le récit auto­bio­gra­phique qui donne son titre au recueil, suivi de textes et de gra­vures que l’auteure avait prévu de regrou­per sous un autre titre.
La pre­mière par­tie, située pen­dant la Seconde Guerre mon­diale et dans un quar­tier bien pré­cis du 18ème arron­dis­se­ment de Paris, plonge le lec­teur dans ces années effa­rantes pour les Juifs de ces rues. Le point culmi­nant et sans doute le plus poi­gnant du récit en est l’arrestation de son père dans ce qui sera la tris­te­ment célèbre rafle du Vel d’Hiv. On apprend plus tard que ce père bien-aimé, qu’elle n’a jamais revu, finira « enterré à coups de pioche à Auschwitz ».

Si l’époque, le quar­tier, une jeune Juive comme pro­ta­go­niste, ne manquent pas d’évoquer Dora Bru­der de Modiano, le paral­lèle s’arrête là, car ce qui chez Modiano demeure le mys­tère inson­dable du passé est ici affreu­se­ment éclairé. Il n’empêche que Rue Orde­ner, rue Labat per­met une plon­gée assez fas­ci­nante dans un quar­tier dont tous les immeubles sont les ves­tiges d’une tra­gé­die et d’une époque révo­lues.
En revanche, si cette partie-là du livre peut lais­ser sur sa fin le lec­teur qui atten­dait une immer­sion plus longue et plus détaillée de ce moment de l’histoire, les textes ajou­tés me semblent d’une qua­lité et d’un inté­rêt inégaux. Cer­tains n’ont aucun rap­port avec le sujet du récit limi­naire. À quelques excep­tions près (citons la p. 117, par exemple) qui m’ont paru inté­res­santes et à leur place dans ce livre, les gra­vures et des articles plus philosophico-psychanalisants, et sans aucun lien entre eux, res­semblent davan­tage à des réflexions dis­pa­rates, jetées sur le papier, plus ou moins appro­fon­dies et par­fois indi­gestes, comme à la p.92, proche du graveleux-scatologique.

Si l’on com­prend la démarche de l’éditeur visant à aug­men­ter l’édition du récit déjà publié, le résul­tat final laisse perplexe.

agathe de lastyns

Sarah Kof­man, Rue Orde­ner, rue Labat, Ver­dier, coll. Poche, sep­tembre 2024, 192 p. – 12,00 €.

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