Franz Kafka, Fiches

Epars

Kafka a vécu huit mois entre 1917 et 1918, dans la cam­pagne de Bohême, auprès de sa sœur Ottla. Il consi­dé­rait cette période comme la plus heu­reuse de sa vie, avant la tuber­cu­lose qui allait l’emporter. Kafka a ras­sem­blé des nota­tions, des remarques. Il a reco­pié ces frag­ments sur des fiches. Elles ont pour objet des thèmes phi­lo­so­phiques, moraux et esthé­tiques.
L’œuvre fran­chit les fron­tières du ratio­na­liste là où la “res­pi­ra­tion men­tale” per­met d’atteindre l’Un dans le mul­tiple, et le mul­tiple en l’un de même que l’harmonie dans le désordre, le sin­gu­lier dans le pluriel.

Parfois, Kafka croit à un cer­tain ave­nir poli­tique : ” ce moment déci­sif du déve­lop­pe­ment humain est, si nous aban­don­nons notre concep­tion du temps, un continu. Voilà pour­quoi les mou­ve­ments intel­lec­tuels révo­lu­tion­naires, qui frappent de nul­lité tout ce qui a pré­cédé, ont rai­son, car rien n’est encore arrivé.”, écrit-il par exemple.
Mais sou­vent nous retrou­vons les idées « noires » de l’auteur. Deux exemples suf­fisent « : « De nom­breuses ombres de décé­dés ne s’occupent que de lécher les flots du fleuve des morts, parce qu’il vient de chez nous et qu’il a encore le goût salé de nos mers. Le fleuve se hérisse alors de dégoût, remonte le cou­rant et ramène les morts à la vie. Les voilà heu­reux, ils chantent des louanges. » ou encore « Toutes les fautes humaines sont de l’impatience, une rup­ture pré­ma­tu­rée du métho­dique, une appa­rente enceinte de pieux autour de la chose apparente”.

Chaque fiche fait par­tie d’un ensemble, mais en même temps consti­tue une unité auto­nome. D’où le choix édi­to­rial du prin­cipe aléa­toire -  ce que ne per­met pas la publi­ca­tion en volume. Les fiches déta­chées ren­voient à la tota­lité de l’univers de Kafka, mais elles forment aussi un voyage autour, des points pos­sibles là où “l’impatience” selon Kafka serait la clé.

jean-paul gavard-perret

Franz Kafka, Fiches, co-édition Nous/La Muse en cir­cuit, Paris, 105 fiches sous cof­fret, 2024 — 35,00 €.

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