Alice McDermott, Absolution

D’une géné­ra­tion à l’autre : cap­ti­vant d’un bout à l’autre

D’Alice McDer­mott, j’avais beau­coup appré­cié La Neu­vième heure, j’étais donc dési­reuse de décou­vrir son nou­veau roman qui ne m’a pas déçue.
À Sai­gon, en 1963, deux épouses d’Américains expa­triés se ren­contrent lors d’une récep­tion. Elles n’ont pas grand-chose en com­mun : Patri­cia (la nar­ra­trice des deux tiers de l’intrigue) est issue d’une souche plu­tôt pauvre, et catho­lique ; elle a déjà connu des héri­tières de grandes familles pro­tes­tantes, telles que Char­lene, et les voit d’un œil cri­tique. Pour­tant, lorsque Char­lene mani­feste le désir de se rap­pro­cher d’elle, Patri­cia cède. C’est sans doute en par­tie parce qu’elle a des affi­ni­tés avec Rai­ney, l’une des trois enfants de sa nou­velle rela­tion, mais aussi (voire sur­tout) parce qu’il s’agit de s’occuper ensemble d’œuvres cha­ri­tables – com­ment refu­ser?
Une étrange ami­tié se déve­loppe. Char­lene s’avère moins pré­vi­sible et plus étrange que prévu. Sous son influence, Patri­cia se sur­prend à déso­béir (ne serait-ce qu’un peu) à son mari bien-aimé, tout en gar­dant un recul, par­fois très pro­noncé, sur les choix et les démarches de son amie. Des décen­nies plus tard, après la dis­pa­ri­tion de Char­lene, Rai­ney va reprendre contact avec Patri­cia et lui révé­ler cer­taines choses insoupçonnées.

L’écri­ture d’Alice McDer­mott a pour grands atouts la finesse et l’art de dépeindre les indi­vi­dus en pro­fon­deur par petites touches. Même lorsqu’elle met en avant le déca­lage entre deux géné­ra­tions – celle des mères et celle de la fille -, la roman­cière le fait d’une manière très nuan­cée, en tenant compte de l’évolution de chaque point de vue au fil du temps, ainsi que de l’envie de com­mu­ni­quer ou de trans­mettre, qui peut être réci­proque.
Par ailleurs, son roman est ins­truc­tif pour ce qui concerne la pré­sence amé­ri­caine au Viêt­nam du temps de J. F. Ken­nedy, trai­tée ici non seule­ment à tra­vers ce que les expa­triés ont en com­mun, mais aussi sous l’angle par­ti­cu­lier des idées (ou des illu­sions) que pou­vaient avoir les catho­liques à cette étape pré­cise de la guerre.

Un roman cap­ti­vant d’un bout à l’autre et émi­nem­ment atta­chant, à mettre entre toutes les mains.

agathe de lastyns

Alice McDer­mott, Abso­lu­tion, tra­duit de l’anglais (Etats-Unis) par Cécile Arnaud, La Table ronde, coll. Quai Vol­taire, 29 août 2024, 352 p. – 24,00 €.

Leave a Comment

Filed under Romans

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>