Antonio Ligabue naît le 18 décembre 1899 à Zurich, en Suisse : sa mère était une émigrée du village de Cencenighe Agordino, près de Belluno. Son père est inconnu. L’enfant resta très attaché à sa famille adoptive de Saint Gall. Bonfiglio Laccabue, épouse plus tard la mère de l’enfant et le légitime. Il n’éprouvera que du mépris à son égard. Dès son adolescence, intolérant à l’école, l’artiste manifeste des troubles psychiatriques : il est placé dans un internat pour enfants handicapés et compense toutefois ses troubles par son talent artistique, ni reconnu ni remarqué.
Sa vie turbulente provoque des désaccords profonds entre lui et sa famille adoptive. Expulsé de Suisse il est envoyé à Gualtieri, la ville d’origine de son beau-père. Il vit seul à la campagne, ne parvient pas à s’intégrer à la population locale et vit d’aides publiques, de petits boulots occasionnels. Cependant, il commence à peindre et à modeler de petites sculptures jusqu’à à se faire remarquer dans le village.
Sa vie se poursuit avec des hauts et des bas et il commence à franchir des étapes de plus en plus importantes et à gagner de l’argent grâce à l’art. Dans les années 1950, il parvient même à s’offrir quelques luxes : acheter des motos, se déplacer. En 1961, il expose pour la première fois à Rom. Son succès est de courte durée car en novembre 1962, quelques jours avant l’ouverture d’une importante exposition il est frappé de parésie. Il est hospitalisé jusqu’à la fin de ses jours, tout en continuant à peindre jusqu’en 1965.
Ligabue est considéré comme un peintre naïf. Ses œuvres continuent à fasciner des dizaines de milliers de personnes et son existence est considérée comme le symbole d’une revanche obtenue grâce à l’art. Cette exposition prouve l’originalité d’un autodidacte capable de s’immerger totalement dans les produits de ses mains (qu’il s’agisse de peintures ou de sculptures).
Créateur d’un monde visionnaire, fait d’animaux féroces, de souvenirs de la Suisse (sa patrie), de vues de la campagne émilienne etc. Ligabue – « fou » en ses vicissitudes – reste un artiste sur lesquels des critiques se disputent encore. Authentique primitif, il a peint sans formalisme, poussé par un besoin intérieur qui ne répondait à aucune idée préconçue ni à aucun héritage issu de l’étude ou de la tradition Pour lui, l’art était un besoin inné. Ses œuvres le prouvent.
jean-paul gavard-perret
Antonio Ligabue, Rétrospective, Palazzo Palla Vicini, Via San Felice, 24, Bologne, du 3 octobre 2024 au 28 février 2025.